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Maison d'Émile Zola

France, Médan

Bonnes AdressesCultureMaison d'Émile ZolaMédan

Jean des Cars

24 January 2022

À Médan, la maison d’Émile Zola et le musée consacré à l’affaire Dreyfus.

Après dix ans de fermeture et une importante campagne de restauration, la maison où Émile Zola écrivit plusieurs romans comprend aussi, dans une annexe, un nouveau et émouvant musée consacré à l’affaire Dreyfus.

C’est, située au nord-ouest de Versailles, une maison en brique rouge et pierre blanche que l’écrivain surnommera la “cabane à lapins”… Émile Zola la découvre en 1878, descendu du train qui passe en contrebas et à bord duquel il est monté à Paris, gare Saint-Lazare. Zola est alors un écrivain connu, chef de file du naturalisme. Son immense cycle romanesque des Rougon-Macquart, histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire, lui a apporté le succès dès les premiers volumes. Mais les mondanités de la capitale l’ennuient. Il cherche une demeure pour écrire au calme. La maison est à vendre, il l’achète pour 9000 francs.

Chaque année, de mai à décembre, l’écrivain quitte son domicile parisien du 21 rue de Bruxelles, dans le quartier de l’Europe, et arrive à Médan, dans les Yvelines, chargé de dossiers et de notes. Dans son bureau, au-dessus de la cheminée, on peut lire une devise latine attribuée à Pline l’Ancien : “Nulla dies sine linea“, “pas un jour sans une ligne”. Chaque matin, pendant quatre heures, Zola écrit, donnant vie à près de 1200 personnages. On doit le laisser travailler. Seul son petit chien, un loulou de Poméranie surnommé Pinpin, est avec lui, allongé à ses pieds. Madame Zola, Alexandrine, s’occupe de la maison. À 13 heures, les domestiques sonnent la cloche pour le déjeuner. Suit une sieste, puis l’auteur joue au croquet ou va nager dans la Seine, fait de la bicyclette… Un temps conseiller municipal, il reçoit ses amis, comme Paul Cézanne (on parlera des “soirées de Médan”), et on note que la cuisine, avec ses carreaux de faïence bleue, rappelle celle de Monet à Giverny.

Après l’écriture, Zola se replonge dans la lecture de ses maîtres, particulièrement Balzac et Flaubert. Le romancier, que les villageois surnomment parfois “le châtelain”, aime le progrès qui lui apporte le confort. Ainsi, la salle de bains est d’une modernité rare avec un chauffe-eau ; il y a l’électricité et le gaz, mais surtout pas le téléphone, car Zola n’aime pas être dérangé. Le succès et ses droits d’auteur lui permettent d’agrandir la maison avec deux tours, surnommées “Germinal” et “Nana“. Bientôt, une ferme est aménagée dans le jardin. La pièce la plus somptueuse est la salle de billard où le couple Zola reçoit ses amis. Sur un mur est accrochée une impressionnante collection d’instruments de musique. Les vitraux, précurseurs de l’Art nouveau, font briller des images aux couleurs vives de paons, de toucans et de perroquets.

À Médan, Zola rencontre une jeune lingère prénommée Jeanne, engagée par son épouse. Jeanne a vingt-huit ans de moins que Zola. Elle est charmante et devient sa maîtresse. De leur union naîtront deux enfants, Denise et Jacques. C’est par une lettre anonyme qu’Alexandrine Zola apprend la liaison de son mari. Elle est particulièrement furieuse, car elle-même n’a pas pu avoir de descendance…

L'Aurore, J'accuse, Émile Zola

L'Aurore, J'accuse, Émile Zola © DR

Comme on le sait, l’affaire Dreyfus apporte à Zola une colossale notoriété, faite autant d’admiration que de haine. Son article, dont Clemenceau a trouvé le titre, “J’accuse”, paraît à la une du quotidien L’Aurore le 13 janvier 1898, sous forme de lettre ouverte au Président de la République, Félix Faure. Un réquisitoire contre l’État-Major et le Conseil de guerre. C’est une référence exemplaire dans le combat contre l’injustice, une bombe, alors que “l’affaire” semblait close. Mais le papier déclenche une tempête politique et judiciaire.

En 1899, Dreyfus est jugé une seconde fois devant un nouveau Conseil de guerre, à Rennes, qui le condamne à dix ans de détention. Artistes et journalistes assistent à l’audience. © DR

La France est dynamitée, coupée en deux, gangrenée par l’antisémitisme. Dreyfusards et antidreyfusards s’opposent violemment sur la culpabilité ou l’innocence de l’officier alsacien et juif. Zola est condamné à un an de prison et 3000 francs d’amende. Plus de 400 chansons sont consacrées à l’affaire, dont 99 % sont antidreyfusardes. À Paris, sur les grands boulevards, des rengaines immondes condamnent le romancier. À Médan, Zola reçoit des lettres de menaces, des pierres sont jetées contre ses fenêtres et, au matin du 29 septembre 1902, l’écrivain est retrouvé inerte dans sa chambre, à son domicile parisien rue de Bruxelles, où il résidait depuis 1887. Il a été asphyxié dans son sommeil par des émanations d’oxyde de carbone. Il avait soixante-deux ans. Les domestiques ont dû enfoncer la porte. L’auteur gisait au pied du lit à colonnes, près de son épouse, à demi-inconsciente, qui respirait à peine. Dans la nuit, il l’avait dissuadée de déranger le personnel, lui disant “Demain, nous serons guéris”. Ils s’étaient donc recouchés.

Passée l’émotion, les diatribes, les éloges et les injures, l’enquête établit que le conduit de cheminée avait été bouché par de la suie et que les boulets allumés par le valet avaient continué à se consumer sous les premières cendres. On s’en tient à cette version du rapport de police, même si d’innombrables admirateurs de Zola, cet auteur qui répétait “la vérité est en marche”, ne sont pas convaincus par la thèse officielle. Un accident ? Il est vrai que c’est assez fréquent à l’époque, et cette cheminée n’avait pas été bien entretenue. Mais une rumeur ignoble répète “le cochon a été enfumé”.

La thèse de l’assassinat ne sera réellement évoquée que vingt-cinq ans plus tard, grâce aux confessions tardives d’un ramoneur, Henri Buronfosse, se disant patriote. L’homme aurait obstrué le conduit de cheminée avant l’arrivée du couple Zola et l’aurait débouché le lendemain, effaçant toute trace de son forfait. La thèse criminelle est désormais privilégiée. Émile Zola est mort d’une machination judiciaire et antisémite, avant que le véritable coupable de l’affaire Dreyfus, le colonel Esterhazy, ne soit enfin démasqué.

Zola avait horreur de l’injustice. C’est son audace et son courage qui ont permis de réhabiliter le capitaine Dreyfus, définitivement innocenté et réintégré quatre ans plus tard seulement, en 1906. Le nouveau musée consacré à l’affaire Dreyfus, aménagé dans l’annexe de la maison de Médan, est passionnant et très émouvant. Il a été inauguré par Martine Le Blond-Zola, arrière-petite-fille de l’écrivain et le président Macron qui a rappelé qu’”il ne faut rien oublier des combats passés”. La haine des antidreyfusards était implacable et Zola ne voulait que dénoncer l’injustice.

Zola et ses enfants adultérins, Denise & Jacques.

Zola et ses enfants adultérins, Denise & Jacques. © DR

D’une façon inattendue, la mort d’Émile Zola a rapproché les deux femmes de sa vie, son épouse et sa maîtresse. Alexandrine Zola fera à Jeanne le plus beau des cadeaux pour les enfants adultérins de son mari : elle leur donnera son nom. Un vrai roman d’Émile Zola…

Maison d'Émile Zola, Rue Pasteur, Medan, France

Ars Musica-Urban Nature

Musique

Le Festival de la musique contemporaine explore les liens entre nature et monde urbain. La création sonore, acoustique, électronique et musicale, est mise à l’honneur.

Informations supplémentaires

Adresse

Maison d’Émile Zola
26 Rue Pasteur, 78670 Medan

Téléphone

+33 1 39 75 35 65

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“J’aimais déjà sa galerie avant de rencontrer l’homme. Je me suis retrouvée assise à côté de lui lors d’une réception et nous avons immédiatement sympathisé.

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