Stéphane Lémeret
09 June 2023
La réalité est que même dans les segments du luxe et du sport, le crossover est devenu incontournable. Lamborghini produit chaque année plus d’Urus que de tous ses autres modèles réunis. Idem chez Aston Martin avec le DBX. D’ailleurs, ce dernier est-il le concurrent principal du Ferrari ? En termes de performances, oui, à peu près. Mais avec son prix d’entrée de 378 000 euros, soit quelque 100 000 euros de plus que l’Anglais dans sa version la plus onéreuse, le Ferrari Purosangue se place bien au-dessus de la mêlée, dans sa propre catégorie !
© Ferrari
Par le passé, Ferrari s’est déjà penchée sur ce qu’on appellera une voiture “pratique”. Encore récemment, la Lusso a été très populaire auprès de la clientèle grâce à ses quatre places, à son coffre raisonnable et à sa partie arrière faisant preuve d’une agréable fantaisie esthétique, quelque part entre le hatch-back et le break. Mais le mot “pratique” reste à prendre avec un certain recul, car il faut dire qu’accéder aux places postérieures d’une Lusso réclame une certaine souplesse.
Le Purosangue va plus loin, puisque c’est un objet comme Enzo Ferrari avait promis de ne jamais en produire : c’est la première quatre portes de la marque ! Des portes un peu spéciales, il est vrai, puisqu’elles présentent une ouverture – électrique – antagoniste. Cela procure un accès parfait aux deux sièges arrières individuels. Ces sièges sont un peu durs, mais offrent un bon maintien, et on dis-pose de l’espace adéquat pour des adultes, tant pour la tête que pour les jambes.
Un coup d’œil sur la fiche technique nous apprend que le Purosangue est effectivement un imposant véhicule. Il mesure à peine moins de 5 mètres de long (comme une Mercedes Classe S), 2 mètres de large et 1,6 mètre de haut. Il repose sur des jantes de 23 pouces, ce qui ne semble curieusement pas excessif dans l’image générale. Clairement, des centaines de crayons auront été sacrifiés sur l’autel d’un design de qualité. Car la moindre lourdeur esthétique eût été un péché et Ferrari l’a évitée, par exemple en habillant de noir les bas de caisse et les arches de roues. Une simple astuce qui fait croire à votre cerveau que le véhicule est plus svelte qu’il n’est réellement.
Une pression sur le bouton de démarrage, et le V12 s’éveille avec une intonation brève et rauque. Il cube 6,5 litres, est monté derrière le train avant (il est presque dans l’habitacle), tandis que la transmission est montée sur le train arrière. Avec cette architecture de vraie voiture de sport, unique dans sa catégorie, le Purosangue peut effectivement regarder tous ses rivaux de haut. Toujours libre de suralimentation (les connaisseurs apprécieront), le moteur met à la disposition du conducteur 725 chevaux. Un pur joyau auquel nous ne trouvons pas le moindre défaut. Il est vif, puissant, linéaire, et quand on lâche une grosse accélération, on profite d’une bande sonore tout simplement épique !
Et si vous pensez qu’une Ferrari de plus de 700 chevaux peut avoir quelque chose d’angoissant, vous faites fausse route. La conduite du Purosangue est “normale” et met rapidement le conducteur en confiance. Il n’y a ici absolument rien d’intimidant. Les ingénieurs de Maranello sont sacrément doués ! Créer une machine qui abat le 0 à 100 km/heure en 3,3 secondes, et est aussi facile à conduire qu’une Golf, c’est un exploit pur et simple. Bien sûr, ils avaient sous la main une foule de technologies de pointe. Le châssis en aluminium, spécialement développé pour le Purosangue, n’en est qu’un exemple.
On citera aussi les roues arrière directionnelles ou encore – last but not least – les suspensions actives, avec de très petits moteurs électriques intégrés dans les amortisseurs. Le résultat est que le Purosangue ne semble pas être soumis aux lois de la physique. Jamais il ne penche et, en dépit de son poids, il réagit aux mouvements du volant avec l’agilité d’une ballerine. C’est tellement impressionnant que cela semble un peu magique. Le système peut aussi détecter les trous et bosses de la route, et adapter individuellement la réaction de chaque roue. C’est si efficace que le véhicule n’est ni doux, ni souple, ce qui donne une impression permanente de sportivité, mais est pourtant vraiment confortable.
© Ferrari
Une question toutefois : le Purosangue est-il enthousiasmant à conduire ? Oui, absolument ! Notamment parce que Ferrari l’a programmé pour se montrer joueur dans les virages serrés, aux mains de qui sait y faire. Certes, il ne fait pas oublier que dans la gamme de Maranello, il y a des choses infiniment plus passionnantes à piloter, mais pour un 4×4 le résultat est impressionnant.
Ferrari a donc construit un crossover. Pardon : la marque préfère dire “une sportive à garde au sol augmentée”. Son prix, ses performances, sa mécanique et son look sont exotiques, mais sa caractéristique la plus marquante est le sentiment de normalité au volant. Il y a l’espace et le confort pour quatre et vos passagers n’enfonceront pas leurs ongles dans les finitions quand vous roulerez un peu plus vite…
Le Purosangue est impressionnant parce qu’il rend tout très facile. Nous avons beau être de ceux qui auraient voulu qu’il n’existe pas, nous sommes forcés de reconnaître que c’est un véhicule prodigieux. Et en cela, c’est bien une Ferrari !