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Macbeth, au Théâtre Royal du Parc

Rédaction

22 January 2019

© Jérome Dejean

La vie est une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne veut rien dire.

Sans doute la plus âpre tragédie de l'ambition politique, Macbeth appartient à la période sombre de Shakespeare. Celle où l'atmosphère des pièces devient cauchemardesque et où les héros, qu'ils soient Hamlet, Othello ou Lear, sombrent dans la passion criminelle et la folie tout en conservant une terrifiante lucidité.

Dès la première scène de l'acte 1, le spectateur est plongé dans un surnaturel maléfique. Macbeth, chef des armées du roi d'Écosse Duncan, et son compagnon d'armes Banquo rencontrent trois sorcières. Plutôt des démones, émanations du mal absolu. En prédisant à Macbeth qu'il deviendra roi, elles ne prévoient pas l'avenir, mais plutôt suscitent et fomentent l'accomplissement d'une horrifique destinée.

Quant à Banquo, les « trois sœurs du Destin » prophétisent qu'il ne sera jamais roi mais que de lui « sortiront ceux qui règneront sur l'Écosse ». Macbeth assassinera Duncan et montrera sur le trône. Il tuera aussi Banquo et tentera de supprimer Fleance, le fils de ce dernier, pour que la prophétie des sorcières ne puisse se réaliser.

© Jérome Dejean 

Le régicide massacrera encore la femme, les enfants et les serviteurs de Macduff (un fidèle du roi Duncan). Le châtiment finira par arriver : l'armée de Malcolm, fils de Duncan, cernera le château de Macbeth qui se lancera dans la bataille où il sera tué par Macduff, « un homme qui n'était pas né d'une femme... ». Toutes les prophéties des sorcières auront ainsi été accomplies.
La mise en scène de Macbeth a toujours constitué un défi de taille. Ici, celle de Georges Lini s'avère inventive. Elle évite les pièges qui peuvent vite faire basculer une tragédie élisabéthaine dans le Grand-Guignol.

© Jérome Dejean 

Le parti pris du procédé de théâtre dans le théâtre permet un certain recul et facilite l'accès du spectateur au cœur du drame. Par exemple, une loge collective dressée à l'arrière-plan du plateau dans laquelle les comédiens attendent de faire leur entrée. Cependant, n'ajoute pas grand-chose le recours à des accessoires tels que micro, porte-voix ou caméra à l'épaule, sans doute utilisés pour créer un certain effet de distanciation.

 
© Jérome Dejean 

L'adaptation respecte et exploite la richesse inouïe de la langue shakespearienne et sa poésie. Là aussi, l'ajout de quelques répliques en langage ordinaire paraît superfétatoire.

En revanche, l'introduction de trois lyrics, dont Love is blindness, tube du groupe U2 que chante ici Itsik Elbaz amène une réelle valeur ajoutée. Itsik Elbaz justement qui campe un Macbeth très impressionnant dans ses hallucinations, ses atermoiements et ses emportements.

© Jérome Dejean

Anouchka Vingtier incarne une Lady Macbeth aimante et sensuelle aveuglée par son ambition. Elle finira par se donner la mort après avoir été l'aiguillon qui a poussé son époux à commettre les crimes les plus abjects. L'actrice parvient à inspirer une sorte d'empathie pour le personnage pourtant monstrueux qu'elle interprète. L'interprétation de Macduff par Didier Colfs sert avec talent ce qui était sans doute l'intention du dramaturge : faire de ce personnage loyal et probe l'antithèse de celui abominable de Macbeth. Luc Van Grunderbeeck est un roi Duncan qui suscite compassion et respect et les trois sorcières sont sales et effrayantes à souhait.

© Jérome Dejean 

La scénographie dans son ensemble concourt efficacement à appesantir cette atmosphère glauque et brouillardeuse de meurtre, de sortilège et de folie qui baigne toute la pièce.
Macbeth, une tragédie d'une densité prodigieuse qui ne manque pas de concordance avec le monde contemporain.

Théâtre Royal du Parc
Rue de la Loi, 3
1000 Bruxelles
Jusqu'au 16 février 2019
www.theatreduparc.be/macbeth

NDLR : il sera assurément piquant de comparer le Macbeth du Parc avec celui qui se jouera dès le 19 mars prochain au Théâtre Varia à Bruxelles dans une mise en scène de Michel Dezoteux

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