La crise du disque n’est un secret pour personne. Souvenez-vous, il y a quelques années, le piratage était en pleine expansion et les ventes de CD, DVD, et de tous les supports physiques étaient en chute libre. L’industrie culturelle tout entière a dû se réinventer et, pour le secteur musical, on a connu l’explosion des plateformes de streaming en même temps que le retour en grâce… du vinyle. Faire plus paradoxal, c’est compliqué !
Avec la baisse de leurs revenus sur les ventes (Deezer, Spotify et autres Apple Music paient très mal), les artistes se sont rabattus sur les concerts pour pouvoir continuer à vivre de leur art. En effet, se produire sur scène permet aussi de vendre du merchandising et d’ainsi gonfler quelque peu ses revenus en proposant CD, T-Shirt, mug ou même chaussettes à son effigie. Et, à ce propos, certains sont très inventifs. Mais la crise sanitaire et le confinement ont fait s’écrouler ce modèle.
Le DJ français David Guetta © DR/Shutterstock.com
C’est alors qu’on a vu une pratique, certes pas neuve, se répandre. Un grand nombre de groupes, chanteurs, auteurs/compositeurs célèbres, que l’on n’imagine pourtant pas parmi les plus démunis, ont ainsi décidé de céder pour une très grosse somme d’argent tout ou partie de leurs droits d’auteur ou d’enregistrement. Que ce soit à leur firme de disques attitrée (Sony, Universal, Warner, BMG) pour Dylan, Springsteen, Sting, Bowie, Paul Simon et Tina Turner, ou à des fonds d’investissement créés spécialement pour l’occasion (comme Hipgnosis Songs Fund fondé en 2018 par un ancien manager de Guns N’Roses) pour Elton John et Beyonce. Et certains vont encore plus loin et plus fort, à l’image du DJ français David Guetta qui a vendu sa discographie passée et … future à la Warner pour 100 millions de dollars. Eh oui, « Les grandes chansons, les golden hits ne meurent jamais et ont un rendement à long terme fiable, ce sont des actifs très lucratifs », assure un bon connaisseur du secteur. Contrairement à l’or ou au pétrole, ils sont insensibles à la conjoncture, on l’a vu lors de la pandémie.
Paul McCartney, ex-Beatles © DR/Shutterstock.com
Comme le monde est bien fait (ou l’inverse…), certains, très connus, font le contraire en récupérant leurs droits. Oui, vous avez bien lu. Ainsi, Sir Paul McCartney s’est-il battu durant des années pour récupérer les droits sur les chansons des Beatles perdus au fil du temps par des mauvais contrats (avec Michael Jackson) ou des erreurs de jeunesse. S’estimant spoliée, elle aussi, par un management peu scrupuleux, Taylor Swift a fait plus fort lorsque le nouveau patron de son label a décidé de vendre dans son dos, pour 300 millions de dollars, ses six premiers albums à un fonds d’investissement de Los Angeles. La chanteuse ne s’est pas laissé faire, et a trouvé la faille, conseillée par une armée d’avocats de haut vol. Désormais hébergée par Universal, elle a tout simplement réenregistré les six albums, à l’identique. Pour le reste, elle a pu compter sur les “Swifties”, le petit nom de ses fans. Résultat : un carton plein pour les nouvelles “Taylor’s versions”. Et un KO debout pour les financiers aux dents longues qui avaient pensé décrocher le jackpot.
Taylor Swift © DR/Shutterstock.com
Pour en savoir plus sur cette industrie universelle que nous sommes beaucoup à financer, rendez-vous dans le prochain Lobby qui sortira le 26 novembre. Sa publication sera accompagnée, comme à l’accoutumée, d’un Forum qui sera accueilli dans le formidable Musée Magritte et qui portera sur le thème : « Préserver un patrimoine : nécessité ou volonté ? » On a comme l’impression que certains pourraient en faire une chanson… Non ?
Newsletter Lobby du 8 novembre 2024, rédigée par Charles-Albert de Romrée et François Didisheim, fondateur de Lobby. Retrouvez la revue des cercles du pouvoir, ici
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