Christophe Vachaudez
28 November 2018
Fils du prince Ferdinand de Bourbon-Siciles et de Chantal de Chevron-Villette, le Prince a deux soeurs, Anne et Béatrice. En 1998, il a épousé Camilla Crociani dont il a eu deux filles les princesses Maria Carolina et Maria Chiara. Le couple vient de célébrer ses noces de porcelaine.
L'Eventail - Monseigneur, quel a été votre parcours ?
Carlo de Bourbon-Siciles - J'ai grandi dans le Var au sein d'une famille soudée avant d'intégrer l'école des Pères Maristes de Toulon et son univers un peu sévère. Nous avions un examen tous les vendredis et si nous le rations, nous étions envoyés au cachot plutôt que de rentrer le week-end chez nos parents. Puis, j'ai fréquenté le collège Saint-Stanislas à Nice avant de monter à Paris. J'ai ensuite visité les États-Unis à l'occasion d'une grande exposition appelée The Golden Age of Naples, puis le Brésil et le Canada. J'ai ensuite vécu trois années à New York avant de m'installer à Rome. Aujourd'hui, nous résidons très souvent en Italie, à Rome, et bien sûr à Naples.
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- Comme vos filles aujourd'hui, accompagniez-vous vos parents à des actes officiels ?
- Très tôt, mon père m'a associé aux cérémonies officielles. Je lui en ai toujours été reconnaissant car c'est la meilleure façon, pour un enfant, de comprendre les responsabilités qui seront un jour les siennes. Il est vrai que les devoirs d'un chef de Maison sont particuliers car ils durent toute une vie ! Je reproduis donc ce schéma en associant mes filles au quotidien de notre famille. Elles ont été éduquées dans cet esprit et ont appris six langues pour dialoguer avec le monde qui les entoure quand elles sont en voyages officiels ou culturels. Maria-Carolina a reçu le titre de duchesse de Palerme, mais porte celui de duchesse de Calabre depuis qu'elle a été désignée comme l'héritière de notre Maison. J'ai conféré à Maria Chiara le titre de duchesse de Capri en l'honneur de cette île de l'ancien Royaume.
- Monseigneur, Votre nom a-t-il impliqué certaines obligations ?
- Notre nom est lié à l'histoire de l'Europe, il oblige et c'est bien normal. Il exige de nous d'être fidèles au passé et de ne rien faire qui puisse porter atteinte à cet héritage. Au contraire, nous devons entretenir le souvenir sans tomber dans la nostalgie. Je me dois, d'assister à de nombreux actes officiels ou commémoratifs, aux côtés de mon épouse et de mes deux filles, tout en demeurant attentif à tous ceux pour lesquels ce riche passé représente quelque chose aujourd'hui. Ainsi, dans le sud de l'Italie, le souvenir des Bourbons reste extrêmement vivace.
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- Certaines rencontres vont ont-elles marqué ?
- Rencontrer les Papes Jean-Paul II, Benoît XVI et François a revêtu pour nous une grande intensité spirituelle. En tant que chef de la Maison royale des Deux Siciles, je suis Grand Maître de l'Ordre Constantinien et de l'Ordre de Saint Janvier qui comptent, avec l'Ordre de Malte et l'Ordre de la Toison d'Or, parmi les plus anciens et les plus prestigieux ordres catholiques. Rencontrer le Saint-Père est une façon de revenir aux sources de cet engagement de prince catholique et de simple chrétien. J'ai aussi été marqué par Mère Teresa qui a changé la vie de milliers de pauvres gens, par Margaret Thatcher, une femme qui ne s'en laissait pas compter, ou encore par Bertrand Picard, un pilote de génie.
- Une autre branche prétend elle aussi à la succession. Qu'en est-il de la réconciliation ?
- Depuis plusieurs décennies, une ancienne branche de la Maison Royale des Deux Siciles qui a fait le choix délibéré de rejoindre la Maison Royale d'Espagne prétend retrouver des droits auxquels elle a officiellement renoncé. Ce conflit, surgi dans les années 1960, a attristé la vie de mon père, de mon grand-père et de toute la famille pendant plus d'un demi-siècle. J'ai donc souhaité une réconciliation afin de ne pas léguer de telles disputes à mes filles. Nous avons tenté de trouver un accord pour que cette branche puisse porter certains titres historiques de la Maison Royale des Deux Siciles. Malheureusement, l'armistice fut de courte durée et ces cousins revendiquent à nouveau une place qui n'est pas la leur.
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- Quels sont vos devoirs en tant Grand-maître de l'Ordre Constantinien de Saint-Georges ?
- L'Ordre Constantinien aurait été fondé par l'Empereur Constantin lui-même et les Papes lui ont conféré ses statuts actuels au début du XVIe siècle. Il a cette particularité d'être un ordre dynastique, directement lié à notre famille qui en assume la responsabilité depuis près de 300 ans. En tant que Grand-Maître, je veille à la pérennité de notre action de lutte contre la pauvreté. En 2014, nous avons lancé un programme intitulé 'La Faim de notre Voisin' qui devait aider autrui sans se limiter à la seule faim alimentaire. Nous intervenons aussi dans des hôpitaux à Rome, Nice, Palerme ou Monaco, en offrant notamment des appareils de surveillance du rythme cardiaque des prématurés ou en créant un jardin sensoriel pour stimuler les malades d'Alzheimer. L'Ordre initie aussi des opérations humanitaires en Afrique comme en Ouganda où il a financé la construction de l'hôpital Saint-Georges. Aujourd'hui, il se tient à la disposition des victimes du terrible tremblement de terre qui a frappé la Ombrie.
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- Connaissez-vous notre pays ? Y avez-vous fréquemment séjourné ?
- Nos liens avec la Belgique sont anciens, à la fois personnels et professionnels. Nous sommes très unis à la Famille royale. Nos filles ont même fait leur première communion en Belgique, dans l'église de Bonlez, avec les princes Aymeric et Nicolas de Belgique qui ont le même âge qu'elles. De plus, le prince Laurent est le parrain de Maria-Carolina.
- Souhaiteriez-vous un jour jouer un rôle sur le plan politique ?
- Jouer un rôle politique, ce n'est pas seulement exercer une fonction élective. Perpétuer l'exemple d'une famille séculaire, en maintenant ses valeurs, en prolonger l'action bienfaitrice à travers l'Ordre Constantinien, c'est aussi jouer un rôle politique et cela me suffit amplement. Quiconque se préoccupe de l'intérêt général s'implique dans en politique.
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- Comment est née votre passion pour la voile ?
- Les Napolitains aiment la mer. Plusieurs épisodes de l'Odyssée ont d'ailleurs pour cadre les côtes de la Campanie et Naples n'était-il pas le royaume d'une sirène ! Ce goût pour la navigation est même une spécificité de notre famille et chez moi, il est très ancien puisqu'il est né quand je suis monté pour la première fois sur un petit optimiste. J'ai découvert la compétition mais aussi cette formidable liberté de naviguer en mer. Outre le voyage, j'aime aussi être confronté aux éléments marins, pour mon plaisir ou lors de régates très disputées.
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