Maxime Delcourt
12 April 2019
Longtemps, Léticia Collet s'est contentée d'être la claviériste douée de Dan San, formation liégeoise spécialisée dans l'artisanat folk. Il semblerait pourtant que l'artiste belge, née au Chili et installée à Liège depuis ses études en communication, avait d'autres envies. Plus solitaires. Plus intimes. Plus sensibles et délicates : « J'ai toujours voulu tenter l'aventure en solitaire, confie-t-elle au magazine Larsen. Par manque de confiance, j'ai souvent reporté l'échéance. Mais à présent, je me sens légitime dans ce métier. Si Condore apparaît seulement maintenant, c'est aussi parce que j'ai mis du temps à m'habituer à ma propre identité artistique. Quand j'ai commencé à composer, j'ai d'abord été surprise par ce que je créais. Je n'imaginais pas m'exprimer dans ce registre. »
Ce registre, c'est celui d'une pop chaleureuse, douce, parfois mélancolique et sombre mais toujours portée par des notes de piano harmonieuses, héritées par instant de la musique classique. La ressemblance avec Agnès Obel et Chris Garneau (dont elle reprend le très beau Love Zombies) paraît ainsi évidente, mais l'univers de Condore est suffisamment singulier pour ne pas l'enfermer dans un héritage un peu trop lourd à porter.
Jaws, son premier EP, délicatement produit par Yann Arnaud (Emilie Simon, Syd Matters, O, etc.), a beau être nommé ainsi en références au classique de Steven Spielberg, aucun excès de violence ou de panique n'est à déceler ici. Lootus, premier extrait d'une élégance rare, en atteste avec éclat : tout chez Condore, de sa voix douce à ses arpèges apaisés, trahit son goût pour une pop à la fois sophistiquée et minimaliste, pour des ambiances à la fois atmosphériques et cinématographiques (l'univers de Danny Elfman n'est jamais loin), et pour ces chansons que l'on aurait envie d'écouter toute la nuit, perdu au fin fond d'une forêt, simplement éclairé par la lueur d'une bougie.
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