Christophe Vachaudez
22 March 2022
Ces colliers procèdent des collections du prince Sixte de Bourbon-Parme qui vit, isolé de sa famille, dans le château familial de Lignières, hérité de sa mère Madeleine de Bourbon-Busset. L’édifice, construit d’après des plans de l’architecte Le Vau renferme encore quelques trésors même si nombre d’objets ont déjà disparu des salons de la demeure. Un buste de Colbert par l’illustre sculpteur Antoine Coysevox, retenait déjà l’attention en 2015.
Fils du prince François-Xavier de Bourbon-Parme, quinzième enfant du dernier duc de Parme, le prince Sixte est le cadet d’une fratrie de six enfants avec qui il a bien peu de rapport. Si sa sœur aînée, la princesse Françoise, connue pour son engagement humanitaire au Liban, parle poliment de divergence de vue, et semble être la seule à avoir conservé un lien avec lui, son frère défunt le prince Charles-Hugues, duc de Parme, et ses trois autres sœurs, Marie des Neiges et les défuntes princesses Marie-Thérèse et Cécile acceptent mal d’avoir été exclus des funérailles de leur mère, en 1984, quand alignés près de la grille du château, ils forment une haie d’honneur au passage du corbillard. Sans cesse aux abois, le Prince se sépare donc de trois colliers du Saint-Esprit, issus de la série de treize, gardée à une époque dans les coffres de Lignières.
© DR
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Selon la tradition familiale, ces colliers dont le parcours est malaisé à retracer proviendraient des collections de Carlos (1848-1909), duc de Madrid, un temps prétendant carliste au trône d’Espagne, et de sa descendance. Les écrins rouge, estampés aux armes de France, présentent un double C couronné, pour le roi Charles X, ou un double L couronné, pour le roi Louis XVIII. Autrefois, les écrins étaient numérotés mais, au fil du temps, les colliers ont été intervertis et il est donc difficile de suivre leur parcours d’autant que le carnet, scrupuleusement tenu par le comte de Chambord et ses successeurs (1820-1883), renfermant numéros et informations, s’est évaporé. Cependant, il est presque certain que la majorité des colliers soit passée entre les mains d’Henri V, l’ultime héritier de la branche aînée régnante des Bourbons.
Portrait du roi Charles X, représenté en tenue de sacre par François Gérard (1825). © Wikimedia
Don Carlos, duc de Madrid (1868 – 1909) © Wikimedia
L’un des trois colliers, réalisé par Coudray, Joaillier des ordres du Roi, et présenté dans un écrin estampé du double L, pourrait avoir été remis par le roi Louis XVIII au duc Charles II de Parme, et rétrocédé à sa mort au chef de maison. En tous les cas, on peut déduire que l’ensemble détenu par le comte de Chambord a sans doute été cédé au duc de Madrid plutôt qu’au duc Robert de Parme (1848-1907) puisqu’il ne faisait pas partie des biens légués par le dit duc à son aîné. Par contre, le prince François-Xavier, père de Sixte a hérité des prétentions carlistes via Jacques puis Alphonse de Bourbon, et donc sans doute aussi des colliers qui, en 1930, sont répertoriés et atteignent le nombre de 36 au château de Froshdorf, en Autriche.
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En ce qui concerne les trois colliers du Crédit municipal, ils répondent tous à une description similaire. D’une qualité remarquable, ils se composent chacun de 29 maillons carrés à trois motifs alternés : quinze montrent une fleur de lys, huit figurent le chiffre « H» du roi Henri IV émaillé de blanc chargé d’une couronne de lauriers reposant sur deux cornes d’abondance et entouré de trois couronnes royales et six sont timbrés d’un trophée d’armes orné d’un heaume émaillé bleu à panache blanc brochant une panoplie composée d’une massue d’Hercule, d’une trompette, d’un drapeau fleurdelisé, d’un arc, d’une flèche, d’un carquois, d’un sabre et d’une lance de tournois. Chaque maillon est anglé de flammes ondoyantes émaillées de rouge translucide sur fond guilloché. Fondé le 31 décembre 1578 par le roi Henri III, l’ordre du Saint-Esprit, le plus prestigieux de la monarchie française était réservé aux souverains étrangers et aux membres masculins de la famille royale. Il n’est plus attribué depuis 1830 et chaque réapparition suscite l’intérêt des collectionneurs et des passionnés d’histoire et de phaléristique !
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