Martin Boonen
03 August 2020
Art Club... voilà un nom qui porte une promesse ! Mais la performance artistique se trouve-t-elle dans l'assiette ou dans le lieu ? Aux portes du Sablon, quartier célèbre des arts et des antiquaires de Bruxelles, sur la place Royale, au carrefour du musée Magritte et des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, la position géographique de ce restaurant éphémère pourrait à elle seule justifier ce patronyme. Mais Serge Litvine, le célèbre investisseur de la restauration bruxelloise et aussi important collectionneur d'art, ne s'est par arrêté là.
© DR/Art Club |
L'art est aussi visible sur les murs du restaurant, affichant des oeuvres de la collection Litivine, comme cet imposant Alechinsky qui trône dans la plus grande salle d'Art Cub. L'ambiance, superbe, associe le chic d'une brasserie de prestige à l'énergie d'un musée d'art moderne.
Il est toujours intéressant de voir un chef de la dimension d'Yves Mattagne (deux étoiles Michelin au Sea Grill) installer ses pianos ailleurs, surtout dans un lieu éphémère. Éloignés de leurs habitudes, ils peuvent se réinventer. Non pas qu'ils ne se remettent pas en question au quotidien, mais changer de décor peut emmener leur réflexion encore un peu plus loin.
© DR/Art Club |
Chez le chef Mattagne, cela ne s'est pas manifesté par l'envie d'un retour au très en vogue terroir (tellement à la mode qu'on finit par ne plus vraiment savoir ce que ce terme traduit dans l'assiette) mais par le désir, au contraire, de faire voyager ses hôtes.
Et quitte à revoir sa cuisine sur le fond, autant aussi la revoir sur la forme. Chez Art Club, pas de menu dégustation formel et rigide. Les préparations, divisées en apéros, entrées, plats et desserts, sont servis sous forme de tapas (à partager ou non). Le chef se permet même la fantaisie d'envoyer en salle les bouchées apéritives et les entrées de manières aléatoires, mélangeant chaud et froid, sans que cela ne dérange la bonne tenue du repas. Au contraire, ce bouleversement du scénario classique de la restauration ajoute un peu d'excitation à l'instant.
Pour Art Club, Yves Mattagne a voulu une cuisine du monde, inspirée par ces voyages. Bien sûr, puisqu'on ne se refait jamais totalement, le poisson, cher à l'ancien chef du Sea Grill, y tient une place importante. Comme c'est à lui que le chef doit - une partie - de sa réputation, c'est une assez bonne nouvelle !
© DR/Art Club |
En apéritifs, on retrouve donc des calamars frits, des ventrèches de thon et de saumon (façon « fish sticks, pour cette dernière), mais aussi plus simplement des edamane à la fleur de sel.
En entrée, l'indémodable carpaccio de boeuf dry aged Harry's Bar partage l'affiche avec des propositions plus étonnantes comme le gyros soft shell crab et tzatziki, le mini burger cabillaud et béarnaise d'huîtres, le pain bao au Robata, échine de porc Ibérique et hoisin.
En plat, nous avons retenu particulièrement la caille au Robata, harissa, miel et Ras-el-hanout ainsi que le collier d'agneau zätär aka, et aubergine chimisuri. On retrouve aussi une veille connaissance : l'américain de thon rouge « comme au Sea Grill » préparé à table, qu'Yves Mattagne a eu la bonne idée de prendre avec lui dans ses valises.
© DR/Art Club |
En dessert, difficile de choisir entre la banane chiboust, rhum et vanille ou les bonbons d'ananas aux épices, avocat et sorbet mangue.
Mais pourquoi choisir ? Comme le reste de la carte, tout est proposé à partager ! Il suffit de vous mettre d'accord avec ceux qui vous accompagnent pour pouvoir balayer largement la carte (fournie !). Un conseil : venez à plusieurs (tout en respectant les mesures sanitaires en vigueurs), vous en gouterez plus !
Le jeu en vaut en tout cas la chandelle : le chef Mattagne fait ici la démonstration de tout son savoir-faire, de son exigence et de son excellence... en toute décontraction.
Il jongle avec brio entre les différences de températures, les jeux de cuissons et de textures et les assaisonnements viennent dynamiter l'ensemble ! Ça se mange sans fin, et même avec les doigts ... plaisir pourtant rare dans un restaurant de ce niveau !
Mais pour profiter de cette bulle récréative d'Yves Mattagne, il ne faut plus traîner : le chef s'installera derrière les pianos d'une Villa Lorraine new-look à la rentrée. Affaire à suivre. En attendant, on fonce au Art Club !
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