Rédaction
19 November 2019
En 2016, 357 millions de tonnes de viande ont été produites au niveau mondial selon la FAO (Food and Agriculture Organisation), ce qui représente 65 milliards d'animaux tués par an pour satisfaire nos appétits, bien loin de nos besoins réels en matière de santé. Cette agriculture industrielle est en grande partie responsable du fiasco écologique actuel qui s'explique par différents facteurs. Tout d'abord, la production de viande génère presque 15 % des émissions de gaz à effet de serre, en raison du méthane expulsé par le cheptel.
© DR/Shutterstock |
C'est aussi une source de gaspillage d'énergie énorme : pour chaque kilo de viande, comptez sept kilos de céréales venues tout droit d'Amazonie, dont les terres arables gorgées de pesticides détruisent peu à peu l'un des poumons de la terre. Ajoutez à cela l'immense problème de l'eau : 13 500 litres sont nécessaires pour produire un kilo de viande de bœuf, alors qu'un kilo de lentilles se contentera de 50 litres. L'énergie requise est immense, les ressources se tarissent et la terre s'épuise.
L'animal est réduit à l'état d'objet insensible à la douleur et incapable de sentiments. Les conditions de l'élevage intensif, le transport routier épuisant, stressant, traînant les animaux sur de très longues distances et enfin l'abattage à la chaîne bouclent une réalité peu reluisante. Chaque jour, 88.000 bêtes sont abattues en Belgique.
De gigantesques panneaux solaires font de l'ombre à un élevage bovin industriel. Assez pour compenser la bilan carbone désastreux de ce genre d'élevage © DR/Shutterstock |
Le sujet de la souffrance animale préoccupe de nombreux consommateurs. La question légitime d'une alimentation sans conscience prend tout son sens puisqu'à l'horizon 2050, il faudra bien nourrir dix milliards de personnes. L'Homme, notre planète pourront-ils survivre à l'ère industrielle ? OGM, produits phytosanitaires, hormones, antibiotiques mais aussi scandales sanitaires ne viennent-ils pas entacher une noble profession ?
Manger de la viande "propre", sans tuer d'animaux, sans souffrance, dans le respect du vivant et de l'éthique, sans contamination bactérienne, traçable à 100%, voilà un projet prometteur.
Sortie tout droit d'une boîte de Petri, la viande de synthèse pourrait résoudre une pléthore de catastrophes sanitaires et écologiques : moins de gaz à effet de serre, reforestation, augmentation des zones d'habitats pour les animaux, accroissement de la biodiversité, des ressources en eau potable... Que diriez-vous d'un bon foie gras sans gavage ou d'un steak tendre à souhait sans la moindre souffrance ? Les promesses des professionnels de ce secteur permettront de continuer à manger des protéines animales tout en soulageant sa conscience. Encore à l'état embryonnaire, le steak de laboratoire pourrait bien se vendre demain dans les restaurants et après-demain dans les supermarchés. Le prix reste encore, à l'heure actuelle, prohibitif. Néanmoins la recherche avance.
La boucherie était un artisanat, la viande est devenue une industrie © DR/Shutterstock |
Mais si les raisons sont enviables, des questions se posent sur les conséquences concrètes d'un procédé encore méconnu à l'échelle commerciale. Si le goût et la texture se rapprochent de la viande industrielle, est-on certain de son innocuité sur l'homme ? Peut-on remplacer par un coup de baguette magique un animal par un amas de cellules qui a vu le jour dans un bioréacteur ? Qu'en est-il des valeurs nutritionnelles et de l'absorption au niveau intestinal des acides aminés ? La copie vaut-elle l'original ?
Pointée du doigt par une étude réalisée par l'Université d'Oxford, la viande de laboratoire produite à grand échelle générerait une énorme quantité de CO2 sur le long terme, plus nuisible encore que le méthane expulsé par les animaux. Mais cette projection réalisée sur une période de 1000 ans ne tient compte que de l'utilisation des énergies fossiles et n'inclut aucunement les énergies renouvelables.
Et si au lieu de produire de la viande en laboratoire, on allait vers une consommation raisonnée de protéines animales, locales et durables © DR/Shutterstock |
Ne vaut-il pas mieux tout simplement réduire au maximum ses apports en protéines animales (viande, poulet, produits laitiers, œufs, poisson), sans pour autant les supprimer, plutôt que de soutenir une industrie productiviste au bord du gouffre ? Pourquoi ne pas se ravitailler dans des filières traditionnelles où terroir rime encore avec qualité, goût et respect animal ? Pourquoi ne pas soutenir l'économie locale qui, à petite échelle, pourrait trouver un modus vivendi entre monde agricole et consommateurs avertis ?
Quel que soit le mode de production, une chose est certaine : demain, le changement sera brutal si aucune solution viable n'est trouvée aujourd'hui.
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