Rédaction
13 November 2015
Nous sommes revenu à Rosebank, banlieue paisible de Johannesburg, d'où nous partons pour Soweto. Soweto (South Western Township), la tristement célèbre banlieue de Jo'burg fut conçue pour être un getho pendant l'apartheid. En 1976, c'est d'ici que partirent les premières manifestations anti-apartheid et dans les années 1980, Soweto fut le symbole de la lutte de la population noire pour ses droits. C'est aussi ici que Mandela s'était insallé, avec sa femme Winnie, avant de se faire emprisonner. Avec une population de plus d'un million d'habitants (la municipalité de Jo'burg en compte quatre millions), Soweto est l'un des "townships" les plus peuplé d'Afrique du Sud, et aussi l'un des plus pauvres. C'est donc un geste fort d'Eyes for the World de se rendre dans cette partie délaissée de la ville.
Les tours "Orlando" constituent de célèbres points pour Soweto© Gil.K |
L'école dans laquelle nous officierons aujourd'hui est l'école d'Heerengracht Primary School. Elle est installée dans un quartier calme de Soweto, plutôt bien fréquenté. Entendons-nous : bien fréquenté pour Soweto. Jusqu'à présent nous n'avions vu que des écoles de province, dans la campagne, fleurie et bien tenue. Ce que nous découvrons à Heerengracht est une autre réalité. L'école est entourée de hauts murs, toutes les portes, toutes les fenettres, portent de lourds barreaux, même à l'intérieur des bâtiments. À l'extérieur, ils se doublent de barbellés. L'équipe d'Eyes for the World découvre les lieux avec le coeur serré.
Le local qu'on nous attribue pour les tests est une classe de biologie. Contrairement aux classe proprêtes et bien rangées du Limpopo, celle-ci est crasseuse, bordélique, le matériel est vétuste quand il n'est pas simplement inutilisable. Les cours de récréation sont jonchées de détritus. Cet univers nous donne l'impression d'être en prison et nous devons faire un véritable effort pour ne pas confondre déliquance et pauvreté. Les enfants qui ont cours ici ne sont pas des délinquants, des bandits ou des criminels comme les batiments le laissent à penser!
La file d'enfants qui attendent déjà devant la porte de la classe pour passer les tests occulaires est rassurante: pour un samedi où il n'y a pas cours et où l'école est normalement fermée, ils sont venus nombreux, très nombreux, accompagnés de leur famille! Koen n'offfre ni des vêtements à la mode, ni des baskets branchées, et encore moins des téléphones portables. Non, Koen et son équipe apportent simplement des lunettes. Mais ces dernières peuvent leur changer la vie. Alors, conscients de l'opportunité qui leur est proposée, ils patientent là, avec leurs sourires... et nous quittent parfois avec des larmes de gratitudes. Les moments humains que nous vivons sont tellement plus forts que les barreaux qui nous entourent!
Puisque les enfants sont venus avec leurs parents, parfois leurs grands parents, Koen testera tout le monde : enfants et adultes. Consciencieusement, il s'appliquera à offrir une paire de lunette à qui en a besoin, peu importe son âge. Plus de 500 personnes passeront dans les mains de l'équipe d'Eyes for the World ce jour-là.
A la fin de la journée, les responsables de l'antenne de l'Agora Club local nous emmènent visiter Soweto. Nous décrouvrons des quartiers très différents. Il y a ceux construits en dur, à l'allure salubre, quoi qu'un peu triste, et ceux, immense, des bidonvilles : océan de cabanons en taule ondulée et en matériaux de construction. Nos coeurs se serrent. Plus encore lorsque nous nous recueillons sur le monument funéraire d'Hector Pieterson, jeune écolier noir abattu par la police lors d'une manifestation le 16 juin 1976, ou lorsque nous nous arrêtons devant l'ancienne maison de Nelson Mandela, devenu mémorial...
© Attila Jandi/Shutterstock.com |
La mission d'Eyes for the World s'arrête là. Nous fêtons cela dans l'un des meilleurs steakhouse de la ville, dans le shopping mall de Rosebank.
Nous éprouvons un sentiment étrange, mitigé, de nous retrouver dans un endroit confortable et international, après avoir cotoyé toute la journée, sans jeu de mot, une misère noire. Il reste tant de choses à faire et comme de nombreux autre projets, Eyes for the World cherche toujours de nouvelles sources de financement, de nouveaux donateurs.
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