Corinne Le Brun
06 November 2019
Projeté hors compétition La Belle Epoque, l'un des meilleurs films au Festival de Cannes, est une comédie tendre, rafraîchissante, optimiste où le passé et le présent se mélangent allégrement, sur fond de relations amoureuses. Guillaume Canet y joue un metteur en scène qui a créé une entreprise permettant aux clients de s'aventurer dans leur période préférée. En parfait directeur d'acteurs, il reconstitue des époques, des lieux dans lesquels les uns et les autres (re)vivent leur passé. Mais voilà, le présent fait malicieusement irruption dans cette reconstitution des souvenirs. Tout ne se passe pas forcément comme avant... Daniel Auteuil, excellent, veut retrouver les meilleurs jours de sa jeunesse, au moment où il a rencontré la femme qu'il voudra aimer et épouser (Fanny Ardant). Au lieu de cela, il tombe amoureux de l'actrice qui joue sa femme, l'étonnante Doria Tiller.
Nous avons rencontré Guillaume Canet à Cannes, souriant, très heureux de présenter la délicieuse comédie de Nicolas Bedos (retrouvez l'interview de Fanny Ardant et Daniel Auteuil dans L'Eventail du mois de novembre, disponible en libraires et sur tablettes ici).
Eventail.be - Dans La Belle Epoque, vous jouez le rôle d'un réalisateur. Un métier que vous connaissez bien...
Guillaume Canet - En tant que réalisateur, j'ai tendance à vouloir tout maîtriser, à vouloir tout faire moi-même, à me concentrer sur les autres, sur les détails... C'était excitant pour moi de jouer ce rôle parce que me regarder, découvrir ma passion, mon énergie était très captivant d'autant que l'écriture du scénario était parfaite. Ce qui m'a surtout touché, ce sont les histoires d'amour. Mon personnage a une relation captivante avec le personnage que joue Daniel (Auteuil). Il est une sorte de mentor. Ce que je trouve beau, c'est que le personnage que je joue veut s'assurer qu'une personne retrouve le bonheur.
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- Les films comiques comme La Belle Epoque (hors compétition) mais aussi comme votre très drôle Rock'n Roll (2016) sont généralement peu représentés à Cannes... Qu'en pensez-vous ?
- Je suis d'accord avec vous. Je ne comprends pas bien cette position. Je pensais sincèrement que Rock'n Roll allait être présenté à Cannes. C'est un film particulier, il avait toute sa place ici. Plus généralement, je ne comprends pas pourquoi les comédies ne font pas partie de la sélection officielle. Ce genre n'est tout simplement pas prévu. Rock'n Roll n'a pas connu un très grand succès à l'étranger, probablement parce que j'ai pas suffisamment accompagné le film...
- Avez-vous la nostalgie d'une période de votre passé ? Quelle critique feriez-vous de l'époque dans laquelle nous vivons aujourd'hui ?
- J'ai eu une enfance un peu cabossée mais l'insouciance m'a aidé. L'inconscience de l'enfance est une chance pour affronter la vraie vie. Ma plus grande critique que je voudrais faire aujourd'hui est que nous sommes, pour la plupart, bernés par le monde dans lequel on vit. Par exemple, dans onze ans, il n'y aura plus d'eau en Afrique du Nord, alors vous pouvez imaginer ce qui va se passer. Les gens devront se déplacer pour trouver de l'eau, certains seront heureux d'autres, très malheureux. Les problèmes seront énormes. Les grosses industries contrôlent aussi les laboratoires pharmaceutiques qui devraient nous soigner. C'est un cercle vicieux.
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- Leonardo Di Caprio est aussi venu à Cannes avec Ice on Fire, un documentaire sur le réchauffement climatique qu'il a produit. Seriez-vous également tenté de vous lancer dans le documentaire environnemental ?
- J'y pense beaucoup. Je réfléchis à un sujet mais je ne vous en dirai pas plus parce que j'aimerais garder cette idée pour moi. Ce qui est vraiment intéressant, c'est de convaincre les gens qui pensent que tout va bien juste parce que la météo est bonne et que temps est meilleur... Je pense que le film de Leonardo est une très bonne idée. J'ai hâte de voir son film ainsi que celui de Tarantino. Nous sommes très proches, Leonardo et moi. J'aimerais réaliser un film un jour avec lui. Peut-être quand il sera plus âgé et moins cher !
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- De quoi êtes-vous anxieux ?
- J'ai toujours été anxieux par rapport à la mort. Quand j'avais 10 ans, mon père allait quitter ma mère. Je lui a dit « si tu passes cette porte, tu n'es plus mon père ». Il a eu une crise cardiaque quelques jours après. Vous imaginez la culpabilité que vous pouvez avoir. Mon père est toujours en vie, malgré ses trois infarctus. J'ai grandi avec cette angoisse de la mort et l'idée que vous ne voulez plus que le temps passe trop vite. Je veux vivre des jours pleins. Je me sens coupable quand je ne fais rien. Je dois toujours m'occuper: faire du jumping, écrire des scénarii, jouer, réaliser des films...
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