Rédaction
10 June 2016
Au premier regard, la série de vingt-huit photos de Post Natural History de Vincent Fournier ressemble à un bestiaire esthétisant dans la lignée des histoires naturelles d'antan : la plante ou l'animal se détache sur un fond neutre et son image est insérée dans un cadre de bois sombre, derrière une vitre et accompagnée d'un cartel cuivré reprenant le nom de l'espèce dans un latin de laboratoire. Mais à regarder de plus près, on prend conscience d'un détail inhabituel. Lapin bipède au regard humain ; pangolin aux écailles métalliques ; scorpion aux pinces de précision ; coléoptères sauterelles ou insectes détecteurs de pollution... Les spécimens semblent avoir subi des modifications génétiques où le vivant se mêle au non-vivant, à l'artificiel, à la cybernétique. Aux espèces en voie de disparition souvent illustrées dans nos manuels d'histoire naturelle s'opposent ainsi ces étonnantes espèces "en voie d'apparition", témoins des progrès de la biologie et des nanotechnologies. En conjuguant ces animaux et ces plantes de l'avenir à un mode de présentation aux accents d'autrefois, Vincent Fournier crée le concept paradoxal d'une "archéologie du futur". L'invention d'une nomenclature pseudo-scientifique renforce parallèlement l'illusion de réalité et la fiction anticipative d'espèces hypothétiques.
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Ce rapprochement avec les anciens cabinets de curiosités évoque également les vanités qui, depuis le XVIIe siècle, rappelaient à la fois le temps qui passe inexorablement et le caractère éphémère de notre existence. Une existence d'autant plus précaire pour notre humanité qui, régulièrement, joue à l'apprenti sorcier. Au point d'inciter l'artiste à imaginer, au milieu des bêtes et des plantes idéales, un Unbreakable Heart, un cœur qu'on ne peut briser, au propre comme au figuré, en or et pierres précieuses, pour remplacer le nôtre si fragile.
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Confrontation entre passé et futur, naturel et artificiel, nostalgie et science-fiction, la vie et la mort, le tout passant par l'expérimentation : Post Natural History de Vincent Fournier trouve sans heurt sa place au sein de la galerie Piano Nobile, dédiée aux arts appliqués et au design, pour lesquels le rapport entre science et esthétique, la relation au passé et la transmission du savoir sont des composantes essentielles.
Ne manquez pas "Post Natural History", la première exposition présentée à la galerie Piano Nobile, en page 51 de l'édition de l'été de L'Eventail, disponible en librairie et sur tablette ici.
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