Gwennaëlle Gribaumont
11 December 2022
© Gilles Dusong
En septembre dernier, la Biennale d’art contemporain d’Enghien nous présentait des étendards signés Shen Özdemir (née en 1996). La grande révélation de cette 4e édition ! Son travail se fonde initialement sur l’exploration de ses traditions et sur le regard qu’elle portait sur la Belgique. “Un regard un peu lourd face à ces deux territoires auxquels je ne me sentais pas appartenir”, explique-t-elle. La crise sanitaire lui ouvre de nouvelles pistes de réflexion. “J’ai pu mesurer à quel point les populations de Binche et de La Louvière étaient attachées à leur folklore en voyant des gens pleurer à l’annonce de l’annulation des carnavals. J’aurais aimé ressentir ce genre d’émotion, si forte, pour mes pays… Mais la réalité était tout autre : je me sentais exclue de ces grandes fêtes populaires. J’ai alors décidé de profiter du premier confinement pour me réinventer tout un monde, en m’inspirant à la fois de la tradition des géants en Belgique et des marionnettes en Turquie. Deux traditions qui me fascinent. De cette manière, je créais une troisième version, beaucoup plus inclusive : mon carnaval utopique, sans genre, sans frontière, sans nationalité…” C’est ainsi qu’est né le Karnavalo. Un carnaval imaginaire – et transdisciplinaire – s’inspirant de différentes cultures. Cette richesse de la diversité se traduit aussi dans les matériaux qu’elle utilise. Shen Özdemir combine toutes les techniques (tapisserie, textile, bois, plâtre, peinture…).
© DR
Progressivement, son carnaval se construit à travers la composition d’une multitude de troupes – ou familles – de têtes joyeuses, expressives et colorées à souhait, transmettant une série d’émotions positives contribuant à notre bonheur. Shen Özdemir consacre ses journées à la création de ce carnaval qu’elle vit entièrement. Comme une gentille revanche… car si elle s’est longtemps sentie exclue de nos folklores, l’artiste est aujourd’hui courtisée par des carnavals dans le monde entier. Elle vit ce folklore universel au plus profond de son être, à l’image de son apparence qu’elle cultive méticuleusement : “La manière dont je m’habille me permet d’être en accord avec moi-même. C’est aussi une manière d’affirmer ma présence… Pas pour être remarquée, mais pour que je me sente enfin acceptée par moi-même”.
Lauréate en octobre dernier du Prix international de la Ville de Tournai, Shen Özdemir profite actuellement d’une résidence au Carrefour des Arts (Bruxelles) où elle sera exposée en juin. L’artiste fait également partie des vingt-cinq artistes sélectionnés pour le Prix de la Gravure et de l’Image imprimée, lesquels sont exposés jusqu’en mars à La Louvière (d’où elle est originaire).
Exposition
31e Prix de la Gravure
Dates
Jusqu’au 12.03.23
Adresse
Centre de la Gravure et de l’Image imprimée
Rue des Amours 10
7100 La Louvière
Belgique
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