Maxime Delcourt
28 December 2022
Eventai.be – J’ai lu que vous aviez connu votre première révélation musicale à 9 ans, en écoutant Bach…
Joachim Liebens – Je viens d’un milieu assez conservateur. Sans même me concerter, mes parents m’ont donc payé des cours de piano et, à neuf ans, effectivement, j’ai pu accompagner mon prof dans une église. Il a interprété une œuvre de Jean-Sébastien Bach, à l’orgue, et c’était fabuleux. En fin de compte, c’est un moment aussi fondateur que les disques d’ABBA ou de Michael Jackson que ma mère écoutait.
© Haunted Youth
– Aujourd’hui, votre musique est pourtant très éloignée de ces mélodies pop très enjouées.
– La vérité, c’est que j’ai découvert d’autres groupes à l’adolescence : Joy Division, Bauhaus, The Cure, Motörhead, toutes ces formations que j’écoutais en peignant. Ça résonnait en moi, je comprenais alors qu’il était autorisé de crier, de se sentir énervé, de jouer de la guitare très fort. Étant donné que j’étais un gamin très anxieux, les albums de ces artistes m’ont été d’une grande aide.
– Vous avez 29 ans, mais j’ai l’impression que tout s’est accéléré pour vous ces deux dernières années : vous avez rempli l’Ancienne Belgique (2 000 places) et succédé à Adele et Dua Lipa aux Music Moves Europe Awards. Vous êtes également suivi de près par des médias anglo-saxons. C’est totalement fou quand on sait que ce projet est né dans votre chambre, non ?
– J’ai encore du mal à me dire que des gens de Seattle ou de New York puissent s’intéresser à ce qu’un belge peut produire. Tout me paraît assez hors-norme, mais je ne compte pas me prendre la tête avec ça. En interview, je cite souvent Mac DeMarco en référence : c’est un artiste qui a su se réapproprier l’histoire du rock et de la pop, tout en tournant le dos aux codes de la notoriété. C’est un anti-héros, et j’ai envie de m’inspirer de sa démarche.
© Haunted Youth
– Si l’on se fie au titre de votre album (Dawn Of The Freak), l’idée serait donc de rendre hommage aux asociaux, aux marginaux ?
– Ce disque est scindé en deux parties : d’un côté, des textes inspirés de mon enfance, très perturbée, très agitée ; de l’autre, des histoires qui font écho aux films d’horreurs que j’ai adoré durant mon adolescence, comme Vendredi 13 ou Massacre à la tronçonneuse. Dans tous les cas, effectivement, il y a une mise en lumière des personnes inadaptées aux codes sociaux.
-Une guirlande « I wanna die » est accrochée sur le mur derrière vous. C’est une mélancolie, un sentiment lugubre, que l’on retrouve parfois à l’écoute de vos morceaux. Pourtant, ces derniers contiennent aussi une puissante force de vie : comment l’expliquez-vous ?
– C’est tout simplement une question d’équilibre. La musique m’aide à extérioriser toutes mes frustrations, à me soulager lors de ces journées où je hais ce que je vois dans le miroir. Mais aujourd’hui, avec cet album, cette tournée et tous ces éloges, bien que légèrement pesants, je suis le plus heureux des hommes.
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