Christophe Vachaudez
07 May 2020
Au fil d'un entretien, elle explique comment concilier ces deux rôles qui, parfois, se croisent et montrent un parallélisme aussi inédit qu'intéressant. Preuve de son engagement, elle fait la couverture du Vanity Fair Italie, un numéro spécial consacré à la lutte contre le coronavirus à travers le soutien de différentes personnalités.
© DR |
Eventail.be - Madame, comment avez-vous pu concilier ces deux rôles importants de votre vie ?
Camilla de Bourbon-Siciles - En épousant le prince Carlo, je me suis engagée à perpétuer une dynastie et à transmettre, à ses côtés, les valeurs de notre Maison mais il se trouve que j'appartiens aussi à une lignée d'industriels et que, bien malgré moi, j'ai été contrainte de m'investir dans les affaires de ma famille, une tâche prépondérante et vitale. Gérer une société aussi importante par sa taille que par sa sphère de compétence n'est pas chose facile. Lorsque des milliers de foyers dépendent de l'entreprise que vous dirigez, chacun de vos choix peut avoir un impact humain immédiat. Lorsque mon mari prend une décision, il engage une Histoire millénaire, celle des Capétiens, moi j'engage la vie de milliers de salariés. Disons que nous savons l'un et l'autre que tout ce que nous faisons ou décidons peut avoir des conséquences qui nous dépassent. C'est peut-être ce qui explique la solidité de notre couple ! Pour affronter cette double responsabilité, il faut beaucoup d'organisation, quelques sacrifices et le soutien indéfectible de nos proches.
© DR |
- Quels sont les domaines d'activités des entreprises que Vous dirigez ?
- Notre société est une entreprise italienne qui évolue dans le secteur des technologies d'avant-garde, et de l'aéronautique, entre autres choses. Nous sommes très présents dans cet univers industriel et nous faisons tout pour rester au niveau d'excellence qu'exigent ces secteurs d'activité, en particulier dans le cadre des rapports étroits avec le gouvernement italien, tant pour le volet civil que militaire.
- Se concentre-t-elle en Europe ou Vous oblige-t-elle à voyager à travers le monde ?
- Je voyage à travers le monde depuis mon enfance. J'ai grandi et étudié à New York et en Europe, voyageant beaucoup en Amérique du Sud et en Asie, ce qui m'a permis d'apprendre cinq langues et les coutumes d'ailleurs.
© DR |
- L'aéronautique est-elle toujours pour Vous un domaine de prédilection ?
- On ne peut gérer une entreprise qui est leader dans un domaine aussi pointu sans être imprégnée par la culture scientifique de ce secteur mais je ne serai rien sans le talent des ingénieurs et des techniciens qui travaillent pour nous. Cela étant dit la gestion, la stratégie, et le management sont en revanche un domaine dans lesquels je suis très à l'aise. Pensez à Serge Dassault qui nous a quitté il y a peu, son père avait souhaité qu'il fasse une école d'ingénieur mais ce n'est pas lui qui a conçu le Rafale. Il a été un très grand entrepreneur car il était un vrai généraliste. Un chef d'entreprise qui n'ouvre pas son champ de vision ne peut pas affronter les défis d'un monde en mouvement. Serge Dassault en est la démonstration.
- Possédez-Vous toujours des vignobles en Italie ?
- Oui, tout à fait, le vignoble Crociani Vino Nobile di Montepulciano dont nous sommes très fiers. Pouvoir perpétuer une tradition familiale est quelque chose qui nous tient très à cœur, car vous connaissez mon attachement à l'histoire, aux traditions et bien sûr à l'Italie. Et puis le vin est avant tout un art de vivre, une culture et une tradition. Le jour où l'on ne partagera plus le pain et le vin, la civilisation occidentale sera bien malade...
© DR |
- Est-il facile, en tant que femme, de s'imposer le monde des affaires qui est plutôt machiste ?
- La Reine Elisabeth II est montée sur le trône à une époque où la vie politique de son pays était entièrement aux mains des hommes, et non des moindres ! Elle règne depuis plus d'un demi-siècle et je ne connais pas un homme politique qui se soit permis de lui manquer de respect. A-t-elle pour autant adopté des valeurs masculines ? Non, car elle a su allier une courtoisie légendaire à une autorité naturelle. Pour moi, elle est un exemple parfait car les femmes ne s'imposeront jamais en imitant les hommes.
- Dans le domaine caritatif, quelles sont les œuvres que vous parrainez ?
- Je vais être très franche. J'ai beaucoup reçu de la vie et j'en ai parfaitement conscience. Ce que Dieu vous a donné, il faut savoir le rendre. La première responsabilité, surtout lorsque vous êtes catholique, c'est de ne par fermer les yeux sur l'état du monde. Notre société actuelle regorge d'inégalités et d'injustices qui sont pour moi insoutenables. Je m'engage particulièrement pour l'amélioration du sort des femmes et des enfants, surtout à travers l'association UN Women for Peace des Nations Unies. Je soutiens la défense de l'environnement en étant la présidente des Amis du Centre Scientifique de Monaco. De plus, j'ai créé ma propre fondation il y a deuxans, la Princess Camilla of Bourbon Charitable Foundation, qui œuvre pour la protection de l'environnement dans les pays émergents, en soutenant des projets scientifiques en coordination avec les autorités locales.
© DR |
- Comment les avez-vous sélectionnées ? Avez-vous des champs d'action de prédilection ?
- Les personnes qui ont entendu parler de mes engagements caritatifs viennent vers moi pour obtenir un soutien supplémentaire, que je suis ravie de fournir quand cela est possible. Par ailleurs les membres de l'Ordre Sacré et Militaire Constantinien de Saint George dont mon mari est le grand maître héréditaire ont reçu pour mission de faire le bien autour d'eux. Ils le font avec charité, abnégation et surtout discrétion. Nous les aidons de toutes nos forces.
- Comment avez-vous accueilli le prix que vous avez reçu à l'ONU le 3 mars 2017 ?
- Me trouver au cœur de cette prestigieuse enceinte, qui plus est, dans le cadre de cette association si chère à mon cœur a été pour moi une expérience unique mais surtout cette journée nous a donné une visibilité extraordinaire pour faire entendre le message qui est le nôtre dans la lutte pour le droit des femmes. Je me rends chaque année à New York pour la journée internationale de la femme afin de soutenir cette action et j'ai eu le grand privilège cette année de sonner la cloche qui marque l'ouverture des marchés à la Bourse de New York.
© DR |
- Cette reconnaissance vous encourage-t-elle à poursuivre vos activités caritatives ?
- Oui mais quand bien même je ne recevrai aucune reconnaissance pour mon action, cela ne changerait strictement rien à mon engagement On fait le bien pour le bien et la médiatisation du bien n'a d'intérêt que lorsqu'elle nous aide à en faire davantage ! Agir pour la seule noblesse des choses fait partie de ces valeurs que mon époux et moi-même nous efforçons d'inculquer à nos filles, les princesses Maria-Carolina et Maria-Chiara.
Publicité