Christophe Vachaudez
30 May 2022
Entrée dans les mœurs au royaume des Pays-Bas et au Grand-Duché de Luxembourg, l’abdication s’est invitée plus récemment en Belgique et en Espagne alors qu’on déteste même l’idée d’en parler en Grande-Bretagne. En Norvège, il s’agirait d’une première. Né le 20 juillet 1973, le prince héritier atteindra les 49 ans cet été, l’âge de la sagesse pourrait-on dire. Haakon-Magnus semble donc prêt à assumer la fonction suprême dans un pays où la monarchie conserve une côte de popularité au beau fixe. Riche en pétrole et en gaz, la Norvège assume son indépendance financière et navigue plutôt bien en dehors de l’Union européenne dont elle n’a pas à subir les errements, un luxe qui n’entrave aucunement ses bonnes relations avec les nations voisines.
Quand il montera sur le trône, Haakon-Magnus perpétuera une tradition millénaire puisque le premier royaume de Norvège fut fondé en 872. Englobé par le Danemark de 1537 à 1814, puis associé à la Suède de 1814 à 1905, le territoire retrouve son indépendance en 1905 et est offert au prince Charles de Danemark, fils du roi Frédéric VIII. Ce dernier devient Haakon VIII lors de son couronnement à la cathédrale de Nidaros à Trondheim le 22 juin 1906. Son épouse, Maud, n’est autre qu’une des nombreuses petites-filles de la reine Victoria. Les souverains n’auront qu’un fils, le prince Olav, qui régna sur la Norvège de 1957 à 1991, date à laquelle lui succède l’actuel roi Harald V. Si Olav se marie au sein du gotha en épousant la princesse Martha de Suède, une sœur de la reine Astrid, son fils s’amourache de Sonja Haraldsen, une jeune roturière issue de la meilleure bourgeoisie. Ils devront attendre neuf ans pour que l’idylle reçoive l’absolution royale.
La princesse Sonja tenant dans ses bras le prince Haakon-Magnus, né le 20 juillet 1973 © Photo News
Le mariage a lieu le 29 août 1968. Deux enfants verront le jour, d’abord une fille en 1971, prénommée Martha-Louise, puis un fils, deux ans plus tard, bombardé héritier en second puisque la loi de primogéniture absolue ne sera votée qu’en 1990. Haakon-Magnus est baptisé en grande pompe en présence des grands-ducs de Luxembourg et des souverains belges, Baudouin et Fabiola. Parmi ses parrains et marraines, citons la princesse Anne, fille unique de la reine Elizabeth, la reine Margrethe II de Danemark et le roi Carl-Gustav de Suède !
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Le jeune garçon grandit à Skaugum, une vaste villa moderne au pied des montagnes à une vingtaine de kilomètres d’Oslo. Acheté en 1938, le domaine est habituellement réservé à l’héritier du trône. Haakon-Magnus reçoit une éducation comme tous les enfants de son âge et grandit dans l’ombre de son grand-père qui meurt alors qu’il va bientôt fêter ses 18 ans. C’est à cette époque qu’il intègre la marine norvégienne et effectue un stage d’une année à bord d’un navire de guerre. Il poursuit sa formation et s’inscrit à l’université de Berkeley en Californie pour y décrocher un master en sciences politiques. Durant ses moments de liberté, il ne se prive pas de pratiquer deux de ses ports favoris : le surf et le windsurf. De retour à Oslo, il s’inscrit à un stage au sein du Ministère des Affaires étrangères. Ainsi armé, le Prince peut assumer la Régence, ce qui fut le cas entre novembre 2003 et avril 2004 quand le roi Harald dut subir un lourd traitement contre le cancer. Physiquement, le prince ressemble beaucoup à sa mère dont il a aussi hérité la fibre artistique.
© i-Images/Polaris/Photo News
Il plaît beaucoup mais il inscrit peu de conquêtes à son palmarès car son cœur semble pris. Lui qui n’a jamais provoqué de remous, contrairement à sa sœur, une originale qui croit parler aux anges, souhaite soudain épouser Mette Marit Tjessem Hoiby, une compatriote divorcée dont le passé rebelle inquiète les norvégiens, d’autant que son premier compagnon, père de son fils Marius, a connu des démêlés avec la justice pour possession de drogues. Les jeunes gens qui se sont rencontrés au Quart Festival, le plus important événement musical du pays, continuent à se fréquenter malgré les réticences de la classe politique et des Norvégiens eux-mêmes.
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Les fiançailles sont finalement annoncées le 1er décembre 2000 et le mariage a lieu à la cathédrale d’Oslo le 25 août 2001, il y aura 20 ans cette année. Avant de fonder un foyer, Haakon-Magnus s’installe à Londres et intègre la London School of Economics alors que Mette Marit suit des cours à l’Université de Londres en histoire africaine et orientale. La princesse Ingrid Alexandra naît le 21 janvier 2004 et le prince Sverre Magnus le 3 décembre 2005. Comme le veut la tradition, le couple a hérité du manoir de Skaugum où il réside de façon permanente. En 2003, le Prince reçoit la charge d’ambassadeur de bonne volonté auprès de l’ONU et s’implique dans des programmes de développements durables à travers le globe.
Depuis 2013, il préside aussi un forum qu’il a créé afin de jeter des ponts entre les entrepreneurs du pays, une sorte de continuité à la Fondation mise sur pied par les princes héritiers à l’époque de leur mariage et qui a pour but d’aider les plus jeunes à concrétiser leurs projets professionnels ou tout simplement à s’intégrer dans la société. Enfin, il est également à l’origine de Global Dignity, un mouvement international qui promeut les initiatives de la jeune génération. Haakon-Magnus et Mette-Marit représentent souvent les souverains à l’étranger, donnant une image dynamique et actuelle de leur pays. Le couple héritier sillonne aussi la Norvège à la rencontre de ses habitants et de ses merveilles naturelles, cabotant au fil des fjords, à bord du yacht royal, ou arpentant de fabuleux paysages, nantis de skis ou de bonnes chaussures de marche. Roi de demain, Haakon-Magnus incarne la continuité monarchique ancrée dans la modernité du XXIe siècle.
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