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Martin Boonen
23 August 2019
Amoureux de la nature, Michel Verhaeghe de Naeyer sait qu'il ne fera pas les grands vins dont il rêve sans respecter l'environnement dans lequel ses raisins vont pousser. C'est pourquoi il fait un choix exigeant (et contraignant) pour la viticulture : la biodynamie et la permaculture.
Le château de Bousval, propriété familiale de Michel Verhaeghe de Nayer © Vignoble du Château de Bousval |
Problème : le domaine familial qu'il reprend sort de plus de cinquante ans d'agriculture intensive, pour ne pas dire industrielle. Ses sols sont meurtris. Pour envisager une nouvelle vie à travers la viticulture, un géologue-expert consulté par Michel Verhaeghe exige la mise au repos du sol durant deux années, préalable obligé pour une parfaite conversion, permettant à la terre d'évacuer des décennies de pesticides.
© Vignoble du Château de Bousval |
Aujourd'hui, les résultats sont probants : la vigne bordée de champs fleuris et de haies champêtres évolue librement avec ses micro-organismes, ses prédateurs naturels (en s'y baladant, on observe d'impressionnants perchoirs à rapaces pour lutter contre les campagnols qui se nourrissent des racines des ceps de vignes), ses légumineuses et un enherbement contrôlé dans une démarche d'agriculture durable et biologique.
© Vignoble du Château de Bousval |
Michel Verhaeghe de Naeyer © Vignoble du Château de Bousval |
Michel Verhaeghe de Naeyer et Vincent Dienst dans le vignoble du Château de Bousval, du côté de la parcelle réservée au Pinot noir. On reconnait à l'horizon la silhouette de la jolie et emblématique chapelle du Try-au-Chêne © Vignobles du Château de Bousval |
Les ambitions sont donc clairement affichées, mais sont-elles réalistes ? Vincent Dienst botte humblement en touche : « La première centaine de bouteilles de notre Pinot noir en 2017, et les quelques 2000 en 2018 sont très réussies. Cela conforte notre conviction qu'il y a un beau potentiel dans ce terroir. Il faudra voir, sur des années un peu plus froides, un peu moins favorables, si on arrive à atteindre la même maturité. Ce sera notre défi. Mais nous ne pourrons répondre à cette question que dans une dizaine d'années. »
Vincent Dienst © Vignoble du Château de Bousval |
Le bon vin se bonifie avec le temps, patiemment. Il en va de même pour la vigne. Michel Verhaeghe et son équipe le savent et ils sont prêts à se donner les moyens d'attendre. « J'investis ici pour mes enfants, voir mes petits enfants » explique le propriétaire. « La clé du succès d'un tel projet, c'est la patience. Si nous voulons aller trop vite, nous proposerons à nos amateurs de bon vin, un mauvais vin. Il n'en achèteront plus jamais » explique-t-il lors de l'inauguration du chai.
La vigne est une chose, le chai en est une autre. Mais force est de constater que le travaille de l'une n'empêche pas de soigner l'exercice de l'autre. Pour arriver à son objectif, Michel Verhaeghe a doté le Vignoble du Château de Bousval d'un outil extraordinaire : un chai ultra-moderne, au dessin contemporain, parfaitement intégré à son environnement, à quelques pas seulement des vignes. Pour cette réalisation, il a fait appel à Charly Wittock du bureau d'architecture AWAA (les bâtiments Caméléon, la brasserie Duvel-Mortgat...).
Le mot d'ordre, une approche éco-responsable, peu de déchets, peu d'énergie grise, des matières renouvelables et recyclables. Tout en courbe, une toiture verte intensive faisant écho à la faune et la flore de la prairie d'origine, de hautes fenêtres reflétant les raies de lumière, il se fond idéalement dans son environnement, prêt à recevoir derrière ses grandes portes d'accès le raisin vendangé à quelques mètres seulement et à assurer la prolongation du travail accompli dans la vigne. Depuis la grande cuverie jusqu'aux ateliers adjacents, tout a été dessiné pour construire le plus naturellement possible le processus de vinification en évitant l'installation de systèmes artificiels de pompes, d'éclairage, d'air conditionnée...
© Vignoble du Château de Bousval |
Si Michel Verhaeghe aime les bonnes choses, il aime aussi les belles choses. Une passion d'esthète qu'il partage avec son épouse, Esther, qui tient une galerie (Gallery Space) place du Chatelain, à Bruxelles. La réunion de leurs deux passions (l'art et le vin) donnera lieu à un événement artistique annuel au chai et à la vigne sous forme d'une exposition. Les œuvres de l'artiste franco-israélien Daniel Enkaoua ouvrent le bal en habillant les tout frais murs de béton brut du chai du Domaine du Château de Bousval.
Esther Verhaeghe de Naeyer, devant le petit alambique du chai, à côté des œuvres de Daniel Enkaoua exposées sur place © Vignoble du Château de Bousval |
Les premières cuvées : « les premières gouttes » en 2016 et « la petite récolte » de 2017, ne seront pas commercialisées. Vincent Dienst et Michel Verhaeghe sont tombés d'accord pour se concentrer sur le millésime 2018 qui s'annonce fabuleux. La commercialisation est prévue pour 2020. Quatre cuvées sont au programme : un Chardonnay « 1er cru », un Chardonnay « second vin », le Pinot noir et le Pinot gris.
La récolte de 2017 a permis de produire quelques 2 000 bouteilles d'une cuvées qui ne sera pas commercialisées. Le premier millésime sur le marché sera le 2018, attendu au premier trimestre 2020 © Vignoble du Château de Bousval |
Nous avons tout de même eu l'occasion de déguster « la petite récolte ». Derrière sa très grande jeunesse, son immaturité, il a été possible de dégager une belle tension et des jolis fruits (encore un peu verts). Il annonce un vin frais mais structuré ! Bref, rien que du bon. Si les paris des grands cépages prestigieux, de la biodynamie et de la permaculture de Michel Verhaeghe de Naeyer et de son équipe se révèlent payant, les vins du Vignoble du Château de Bousval auront les arguments pour se tailler une place de choix parmi les tous meilleurs du pays... et au-delà ?
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