Gwennaëlle Gribaumont
24 October 2022
Synergie muséale : l’union fait la force
© Olivier Bourgi
Avec Le Delta, le pôle muséal Les Bateliers Pôle (musée archéologique) et le TreM.a, le musée des Arts anciens, Namur et ses alentours concentrent des institutions muséales de toute première qualité. Résultat ? La capitale wallonne se place au rang des destinations touristiques immanquables… En matière de développement culturel, on est loin, très loin de la réputation de lenteur qui colle à la peau des Namurois. Néanmoins, comme l’escargot ou plutôt la tortue de Jan Fabre qui campe au sommet de la Citadelle, nous recommanderons chaleureusement à tous les amoureux d’art et de culture d’y prendre leur temps.
© Musée Rops
© Musée Rops
Longtemps, le musée Félicien Rops a polarisé le gros de l’attention. À juste titre : ses collections sont fabuleuses et la personnalité éponyme sulfureuse à souhait. Depuis quelques années, le musée multiplie les synergies avec les autres institutions namuroises. Et il y en a pour tous les goûts : l’archéologie et l’antiquité à l’îlot des Bateliers, le Moyen Âge au TreM.a, le XVIIIe siècle à l’Hôtel de Groesbeeck – de Croix, le XIXe siècle au musée Rops, les objets reliés à l’Afrique et au passé colonial au MusAfrica (temporairement fermé pour travaux) et enfin les aspects les plus contemporains au Delta. Vu sous cet angle, Namur offre un panorama complet, mais également très attractif, de l’histoire de l’art. Chaque lieu, à taille humaine, aborde son sujet de manière spécifique. Autre avantage, la situation géographique des différents espaces offre l’occasion de prendre l’air, de faire une promenade avant d’aborder, en toute décontraction, le parcours suivant.
Le TreMa. © DR
Ne dites plus “Musée des Arts anciens du Namurois”, mais TreM.a ! Exit la réputation poussiéreuse que le musée s’est longtemps coltinée ! Le TreM.a relève tous les enjeux propres aux musées du XXIe siècle : développements numériques, médiation des publics, espaces d’accueil qui donnent véritablement envie de s’y poser et d’y revenir… En outre, les pièces présentées, aussi séculaires soient-elles, reflètent des préoccupations universelles et intemporelles : la vie, la mort, l’amour… Autant d’objets qui nous offrent une autre compréhension de notre propre réalité. Ouvert depuis septembre 2019, Le Delta (anciennement Maison de la Culture) est un lieu culturel conçu et organisé par la Province de Namur. Trois de ses niveaux d’exposition sont dédiés à l’art contemporain. Au-delà de sa programmation, Le Delta se veut un lieu de vie agréable et ouvert à tous, se distinguant par son spectre interdisciplinaire (cinéma, théâtre, danse, image animée, musique…).
'Young poet' 2021, collage sur papier, 33 x 25 cm © Bilal Bahir
Côté galeries, Namur compte une demi-douzaine d’enseignes actives. À l’abri de toute préoccupation mercantile, la Galerie Détour (subventionnée par la fédération Wallonie-Bruxelles, FWB) défend l’art contemporain en proposant à la fois des expositions d’artistes confirmés, mais aussi de jeunes plasticiens – du Namurois notamment – leur offrant ainsi la visibilité tant recherchée. Dernière installée, la Belgian Gallery. Superbe espace sur la place d’Armes, cette enseigne présente des artistes belges, de la fin du XIXe siècle aux démarches les plus actuelles. Dernière mention dans notre triumvirat, la Gery Art Gallery. Organisant des accrochages souvent dictés par le cœur, Gery Pirlot de Corbion participe également à des nombreuses foires. La prochaine ? Antica Namur avec un espace dédié à l’œuvre de Bilal Bahir.
Balade sculpturelle
Françwès & Djozef © DR
Vous avez un chien ou un chat ? Djoseph et Françwès ont des escargots ! Cette sculpture de Suzanne Godard, inaugurée en 2000 sur la place d’Armes, présente les deux personnages folkloriques imaginés par Jean Legrand (1906-2002), caricaturiste au journal Vers l’Avenir. Héros de la presse quotidienne, ils incarnent deux vieux de Sambre et Meuse, déambulant “tot doûcemint” dans les rues de Namur. Aussi lentement que les escargots – en laisse ou en cage – qui les accompagnent. Une œuvre qui dégage toute la nostalgie du temps passé… Un temps où l’on n’était jamais pressé. Si vous passez à côté, veuillez noter que caresser les cornes de l’escargot accorderait chance et prospérité…
'Searching for Utopia' de Jan Fabre. © Margaux Voglet
Contre toute attente, la vraie star n’est pas un escargot mais une tortue. Géante de surcroît. Œuvre de Jan Fabre, Searching for Utopia a été installée en 2015 à l’occasion d’une exposition de l’artiste flamand, en dialogue avec l’œuvre de Félicien Rops. Une œuvre commandée, à l’origine, par la ville de Nieuport pour la triennale d’art Beaufort : Jan Fabre se représente, cavalier d’une tortue imaginaire, fixant l’horizon d’un air décidé à la recherche d’un monde meilleur. Cette œuvre qui domine la ville depuis la Citadelle ne devait pas y rester, mais la population s’y étant largement attachée, Namur a décidé de l’acheter. Sans surprise, la tortue de Jan Fabre s’est rapidement imposée comme l’un des symboles artistiques les plus forts de la ville.
Les œuvres murales d'Isaac Cordal. © DR
Ces miniatures qui font le mur sont l’œuvre d’Isaac Cordal. En novembre 2017, quarante-cinq sculptures miniatures de l’artiste espagnol ont été disséminées dans des endroits inhabituels et improbables de Namur. De façon ironique, mais aussi poétique, ces personnages aux allures de fonctionnaires anonymes (mesurant à peine 15 centimètres) invitent à s’interroger sur le rôle et la place que chacun occupe dans la société. Coincées dans une niche ou un éclat de mur, assises sur un rebord au-dessus d’une vitrine, accrochées à un câble électrique, ces statuettes forment un parcours urbain insolite à découvrir à pied entre l’Hôtel de Ville et Les Bateliers.
Le cheval Bayard d'Olivier Strebelle © Gribaumont
Monté par les quatre fils Aymon, le Cheval Bayard (1958) est une figure incontournable de la ville de Namur. Cette interprétation contemporaine de l’animal mythique est l’œuvre d’Olivier Strebelle (Bruxelles, 1927-2017). Dans un mouvement asymétrique, le légendaire destrier s’arrache du sol pour s’élever dans les airs avec puissance et légèreté. Présenté en exclusivité à l’Expo 58, il faudra attendre 1961 pour le voir transporté par hélicoptère et définitivement placé sur son bloc de béton haut de sept mètres. La petite histoire raconte que l’architecte du pont, Roger Bastin, ne voulait pas de cette œuvre à côté de son ouvrage ! Le chanoine Lanotte, qui a introduit l’art contemporain dans les églises, l’avait même qualifiée de “monstrueuse”.
Plus discrète, mais non moins polémique, une autre œuvre de Strebelle : Bras ouverts (1999). Une œuvre initialement placée à l’orée du Bois de la Cambre. Une femme aux membres interminables, couchée sur le dos et jambes en l’air, écarte largement les bras. Intrigués, les passants s’interrogent : s’agit-il d’une pieuvre ? D’un serpent à trois têtes ? Six mois après son installation, l’œuvre est enlevée. Elle coule aujourd’hui des jours heureux sur le rond-point d’Harscamp où elle semble vivre à l’abri de tout mouvement contestataire. Elle reste quand même très particulière…
Les couleurs du street art
Depuis 2015, plusieurs fresques urbaines ont été réalisées et viennent colorer les murs de la ville : la fresque de l’artiste Eyes-B sur le mur de l’aile Eden (Maison des Échevins), Des fleurs pour Namur de Dan Brault réalisée en version monumentale par le collectif Propaganza (place de Québec), Vive Nameur po tot de Kahef sur le pignon de la résidence Baduelle (rue Basse-Marcelle), Skills conçue par le collectif namurois Drash sur un mur de l’institut technique Henri Maus (côté rue Courtenay) ou encore Chaos végétal de Tamar Kasparian, qui a permis à l’art de s’épanouir dans le tout nouveau Jardin des Poètes. Cette œuvre côtoie les livres-poèmes disposés sur les murs et les chaises-poèmes du sculpteur québécois Michel Goulet. En octobre 2017, une nouvelle fresque, pop et colorée, a été inaugurée. Elle a été imaginée par l’artiste Jean-François Octave en hommage à Evelyne Axell, figure majeure de l’art du XXe siècle en Belgique.
Office du tourisme
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