• HLCÉ

Réinventer l’agriculture, un modèle écologique et social pour demain

AgricultureAlimentationDurabilitéDurableÉcologieNutritionSylvie Dejardin

Sylvie Dejardin

03 September 2024

Réinventer l’agriculture Un modèle écologique et social pour demain

Dans un contexte mondial marqué par des défis écologiques croissants et des incertitudes économiques, les systèmes agricoles actuels sont mis à l’épreuve. Les enjeux agro-alimentaires deviennent cruciaux pour garantir la sécurité alimentaire tout en préservant notre planète. Pour comprendre les perspectives et les solutions possibles, Olivier De Schutter, ancien rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation à l’ONU (2008-2014), partage ses analyses sur la pérennité des systèmes agricoles actuels face aux défis environnementaux.

L’Éventail – Pouvez-vous expliquer l’évolution et les conséquences des principaux enjeux agro-alimentaires dans le contexte mondial ?
Olivier De Schutter – Depuis les années 1960, les politiques agricoles mondiales ont été axées sur l’augmentation de la production pour répondre à la crainte de pénurie alimentaire et à la croissance démographique. Cela a entrainé une augmentation du nombre de machines agricoles, des systèmes d’irrigation à grande échelle, le développement de variétés de plantes à haut rendement, ainsi que l’usage massif de pesticides et d’engrais chimiques. Ces pratiques ont eu des conséquences environnementales majeures, notamment l’érosion de la biodiversité, la détérioration de la qualité des sols, due notamment aux monocultures, et la pollution des nappes phréatiques par les intrants chimiques.

En termes de qualité alimentaire, cette approche a favorisé la production de calories au détriment de la diversité nutritionnelle, conduisant à une alimentation peu diversifiée et à des taux d’obésité élevés. Le système productiviste actuel pose également un problème de santé publique en raison de l’augmentation de la consommation d’aliments transformés et ultra-transformés, facilitée par les subventions agricoles et la disponibilité de l’énergie fossile à bas coût. Les processus de transformation, d’emballage et de transport sont très énergivores, contribuent ainsi à 30% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Enfin, la perte des savoirs culinaires et la diminution du temps consacré à la cuisine ont modifié les normes sociales entourant l’alimentation. Aujourd’hui, la priorité n’est plus donnée à la préparation de repas frais, et les produits transformés dominent, ce qui reflète un changement technique et civilisationnel dans notre rapport à l’alimentation.

Olivier De Schutter

Olivier De Schutter © Tineke d’Haese

– Comment évaluez-vous la pérennité des systèmes agricoles actuels face aux défis écologiques tels que le changement climatique et la perte de biodiversité ?
L’agriculture actuelle est à la fois coupable et victime des problèmes environnementaux. Elle est coupable d’entraîner la perte de biodiversité, l’érosion et la pollution des sols, et de contribuer aux émissions de gaz à effet de serre. Les sols, en mauvaise santé, ne peuvent plus agir comme puits de carbone. En même temps, l’agriculture est victime des changements climatiques (sécheresse, inondations), de la baisse de la pollinisation et de la fertilité naturelle des sols, ce qui la rend très fragile et peu résiliente. Ce cercle vicieux rend le système agricole insoutenable à long terme.

– Quels sont, selon vous, les principaux obstacles à la transition vers des systèmes agricoles plus durables ?
Dans nos pays, les principaux obstacles sont le coût de la main-d’œuvre, qui pousse à développer des techniques de production intensives en capital et peu en main-d’œuvre, favorisant les machines et les monocultures. Une autre contrainte majeure est le subventionnement direct et indirect des énergies fossiles, qui maintient à flot un système agricole non pérenne. Si ces subventions étaient supprimées, l’agriculture actuelle deviendrait trop coûteuse et les agriculteurs seraient forcés de changer de modèle. Ils sont également confrontés à un faible pouvoir de négociation face aux grandes centrales d’achat, des coûts de production volatils liés aux prix de l’énergie, et une concurrence mondiale intense qui les oblige à réduire constamment leurs marges pour survivre. La politique agricole commune (PAC) n’a pas toujours protégé les agriculteurs européens de la concurrence déloyale venant de l’extérieur de l’Union européenne (UE).

– Est-il possible de nourrir la planète avec un modèle respectueux de l’environnement et des valeurs sociales ?
Il est possible de nourrir la planète tout en respectant l’environnement et les exigences d’un travail décent grâce à des approches complémentaires. La PAC de l’Union européenne, représentant près de 40% du budget européen, peut instaurer des conditions de concurrence équitables en intégrant des contraintes environnementales et sociales, comme des normes garantissant une rémunération adéquate des ouvriers agricoles. En imposant des conditions strictes pour les produits importés, l’UE peut protéger ses producteurs de la concurrence déloyale.

L’agroécologie, qui respecte la complexité des écosystèmes, combine et maximise les ressources naturelles en encourageant des pratiques telles que l’agroforesterie ou des systèmes de polyculture-élevage. Travailler en harmonie avec la nature assure des pratiques agricoles durables, tout en permettant de maîtriser les coûts de production, notamment en réduisant l’usage d’intrants produits avec des énergies fossiles. Il est possible de développer un modèle agricole durable et équitable répondant aux défis alimentaires mondiaux tout en protégeant l’environnement.

Fun fact : un effet mouche !

Art & Culture

L’artiste américain John Knuth exposait cet été The Hot Garden à la galerie Hollis Taggart de New York, une série de ses fameuses Fly Paintings.

Soirée caritative à Pairi Daiza

Vie mondaine

À l’initiative de Marc Coucke et Éric Domb, une grande soirée a été organisée dans le parc animalier de Pairi Daiza pour soutenir la Fondation Pairi Daiza, engagée depuis dix ans dans la protection de la biodiversité.

19/06/2025

"Cellule de crise", au TTO

Arts & Culture

Myriam Leroy signe un huis clos où le sexisme contemporain s’infiltre comme une fuite invisible dans les canalisations du pouvoir.

Belgique, Ixelles

Du 16/10/2025 au 29/11/2025

Publicité

Eisenhower, leader historique

Société

Nouvelle année, nouvelles résolutions (qu’on tiendra ou pas) et, surtout, nouvelle édition des Lobby Awards ! La cérémonie se tiendra le mardi 21 janvier à l’AG Campus de Bruxelles, et en l’attendant, on vous propose de décortiquer ce que signifie vraiment être un Leader. Pour ouvrir le bal, en tant que fondateur de Lobby, François Didisheim s’est frotté à une question qui pique un peu : s’il ne fallait retenir qu’un leader dans l’histoire, qui serait-ce ? Celui qui est aussi le nouvel homme fort de L’Eventail a tranché : Dwight D. Eisenhower.

Tous les articles