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Berlinale, focus sur l'Iran

Rédaction

07 February 2015

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[caption id="attachment_14705" align="alignnone" width=""]La réalisateur Jafar Panahi[/caption]Interdiction professionnelle: c'est depuis plusieurs années le statut de Jafar Panahi, un des meilleurs cinéastes iraniens. En 2011, il avait été invité à faire partie du jury de la Berlinale. Le régime des ayatollahs lui avait alors interdit de quitter son pays et l'avait déclaré coupable de « propagande hostile au système ».

Résultat : Panahi s'est trouvé condamné à six années de prison et à vingt ans d'inactivité. Comment contourner cette censure imbécile ? Son film Taxi, présenté ici en compétition, montre un créateur qui arrive à se jouer de toutes les contraintes. Faute d'argent et de soutien officiel, le metteur en scène invente une solution. Il se met au volant d'un de ces taxis jaunes qui silllonnent Téhéran, installe sur le tableau de bord une mini-caméra quasi invisible et filme les conversations de ses passagers. Le résultat est à la fois féroce et hilarant. Le film nous livre une série d'instantanés de la vie quotidienne du peuple iranien.

Panahi intervient parfois discrètement, mais juste assez pour que ses clients déballent leurs soucis intimes et nous livrent obliquement une opinion sur le régime actuel. Un épisode savoureux nous fait rencontrer la jeune nièce du cinéaste, une gamine volubile mais assez insupportable, qui rêve elle aussi de devenir réalisatrice et filme son tonton sans lui épargner au passage quelques critiques acides. Taxi est un film attachant, d'une extrême modestie, une leçon d'esthétique et de morale.

Au sujet de Queen of the Desert, présenté également ce vendredi en compétition, un de mes grands amis berlinois, excellent critique de cinéma, me confiait : « Pendant le premier quart d'heure, j'ai cru que Werner Herzog avait décidé de faire une œuvre ironique ou parodique. Et puis je me suis rendu compte qu'il prenait tout cela terriblement au sérieux »...  Pour rappel, Herzog a été une des figures emblématiques, dans les années 1970 et 1980, de ce renouvellement du cinéma allemand qui s'est incarné dans des longs métrages comme Aguirre ou Fitzcarraldo. Sa carrière a connu ensuite un net fléchissement et il s'est égaré dans des documentaires à mon sens assez fumeux. Queen of the Desert, production ambitieuse, marque un retour au romanesque dans le style, disons, de The English Patient. Exotisme et amours contrariées sur un fond de paysages moyen-orientaux. Le dossier de presse parle de l'héroïne comme de « the female Lawrence of Arabia ». En effet, cette Gertrude Bell, qui a réellement existé, était une jeune femme de la meilleure société britannique, fascinée par le monde arabe, qui a exploré au début du XXe siècle les régions les plus turbulentes de Syrie, d'Irak et d'Arabie. On lui a même prêté un rôle politique dans la redéfinition des frontières de ces pays après la première guerre mondiale (la Grande-Bretagne et la France se sont partagé le gâteau).

Miss Bell est interprétée par Nicole Kidman, comédienne toujours aussi insipide, qui a l'air, avec ses tenues impeccables en plein désert, de sortir d'un reportage pour Vogue ou d'une publicité pour L'Oréal. On croise aussi deux ou trois fois un Lawrence d'Arabie absolument ridicule. Le rôle est tenu par Robert Pattinson, acteur adulé des adolescentes, rendu célèbre par ses prestations dans Twilight. Au passage, je me disait qu'il est grand temps d'en finir avec le mythe de Lawrence d'Arabie, ce poseur mythoman qui n'aura été finalement d'aucune importance dans la géopolitique du monde arabe au début du XXe siècle. Ce qui n'empêche - mais cela n'a rien à voir - que le film de David Lean est un classique indémodable du cinéma.

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