Stromae, les dessous d’un phénomène, c’est d’abord l’histoire d’une obsession. Celle que le journaliste Thierry Coljon (Le Soir) nourrit pour la musique du maestro de la scène musicale francophone, cet artiste dont il tentait déjà de réaliser une biographie en 2011, ce phénomène dont la grandeur, le parcours et la singularité l’incitent en 2016 à écrire un « roman farfelu » dans lequel Stromae est décédé. Une pure fiction faite de dérision et d’humour noir ? Plutôt une façon de faire dialoguer son héros avec certaines de ses idoles (Jacques Brel, Cesária Évora, David Bowie).
Fruit d’un amour profond pour les trois albums de Paul Van Haver (Cheese, Racine Carrée, Multitude), Stromae, les dessous d’un phénomène se reçoit toutefois moins comme une énième variation sur le thème de l’enfant prodige que comme une analyse sincère de celui qui ne cesse de forcer l’admiration depuis 2010, année de sortie de Alors on danse, ce tube que le Guardian a un jour décrit comme le « titre le plus déprimant de l’histoire de la dance music ».
À la lecture de l’ouvrage, quelques regrets surgissent toutefois : « Les dessous du phénomènes » évoqués dans le titre paraissent finalement peu révélateurs pour quiconque s’intéresse de près à Stromae, tandis que certaines comparaisons (avec Angèle ou Karl Lagerfeld) paraissent peu fondées. Ou du moins, pas assez développées. Pis encore, certains raccourcis, entrepris dans l’idée de célébrer la grandeur du touche-à-tout belge (chant, composition réalisation, stylisme), viennent nuire à la pertinence de l’analyse : non, « Dégueulasse », produit par Stromae, n’est pas le single le plus populaire de Caballero et JeanJass, loin de là !
© Pieter-Jan Vanstockstraeten/Photo News
En fin de compte, Stromae, les dessous d’un phénomène vaut surtout pour la présentation qu’il fait d’un artiste iconique des années 2010, d’un control-freak qui aurait pu collaborer avec Madonna mais qui privilégie l’exigence artistique au simple coup de com’ d’une collaboration, l’inventeur d’un style qui a su comme personne mélanger ses influences (chanson française, rap, musiques électroniques, rumba) en une poignée de morceaux fédérateurs, hybrides et pourtant redevables à leur pays d’origine. « Il a créé un look improbable à son personnage sorti tout droit d’une BD et de l’imagination d’un surréaliste belge, digne fils de Magritte, Brel, Hergé et Ensor », écrit fort justement Thierry Coljon. L’idée ? Rappeler à quiconque que Stromae a inscrit son nom au sein du même panthéon que ses illustres prédécesseurs.
Titre
Stromae, les dessous d’un phénomène
Auteur
Thierry Coljon
Éditeur
Mardaga
Sur internet
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