Maxime Delcourt
20 April 2020
Christophe, ce n'était pas seulement l'auteur d'Aline ou Les marionnettes, ces chansons pour midinettes qu'il se plaisait à chanter du temps de Salut les copains. C'était surtout le dernier des Bevilacqua, ce musicien capable de se réinventer constamment, refusant la nostalgie, tournant le dos à ces petites habitudes de studio qui finissent par ronger le cœur créatif de temps d'artistes. Ainsi, et c'est précisément ce qui force l'admiration, Christophe a traversé les décennies avec une grâce et un goût pour la nouveauté sans cesse renouvelé.
Dans les années 1970, par exemple : bien aidé par un label apte à suivre sa cadence infernale (Les Disques Motors), Christophe a défini l'avenir de la pop en France, lui a offert suffisamment de pistes à suivre et de possibilités à explorer pour les décennies à venir. On ne l'a jamais assez dit, mais entre la pop orchestrale des Paradis Perdus et les plages cinématographiques du Beau Bizarre, il ne s'est écoulé que cinq ans. Cinq ans c'est parfois le temps qu'il faut à des groupes novateurs comme The Strokes ou Radiohead pour enregistrer un nouvel album...
© DR |
La mutation de Christophe entre tous ces albums est donc tout simplement exceptionnelle, rare, forte de nombreuses propositions, toutes retenues par la postérité. Bien sûr, le rythme et les albums ont ralenti par la suite, Christophe traversant la décennie 1980 en fantôme. Mais il reste présent dans la musique des autres, témoignant même dans les années 2000 et 2010 d'un véritable savoir-faire pop à travers des albums audacieux (Aimer ce que nous sommes et l'ultime Les vestiges du chaos), toujours en phase avec les meilleures mélodies que l'époque a en réserve.
Alors, forcément, sa discographie a fait des émules. À raison, tant il était le dernier artiste capable de faire la transition entre l'ancienne et la nouvelle génération, à incarner une sorte de trait d'union entre Adamo, le punk sophistiqué d'Alan Vega (avec qui il a collaboré), les expérimentations synthétiques de Jean-Michel Jarre, la poésie de Bashung et une scène pop actuelle qui n'a cessé de lui rendre hommage (Feu! Chatterton, Christine & The Queens, Juliette Armanet, etc.) : tous, visiblement, à la recherche de ces paradis aujourd'hui définitivement perdus...
Publicité