Maxime Delcourt
17 August 2021
Lorsque Serge Gainsbourg revient en 1976 avec L'homme à tête de chou, le Français est déjà un habitué des albums conceptuels : avant celui-ci, il y a eu Histoire de Melody Nelson (1971), Vu de l'extérieur (1973) et Rock Around The Bunker (1975). Tous ont été accueillis dans un relatif anonymat, injustement rejetés par le grand public, peut-être effrayé à l'idée de plonger à l'aveugle dans des albums fourmillants d'idées, très narratifs et constamment positionnés à l'opposé des grands classiques de la variété française de l'époque. À chaque fois, ces albums sont en tout cas accompagnés d'une pochette relativement travaillée, presque iconique en quelque sorte.
L'homme à tête de chou, par exemple, est directement inspirée d'une sculpture de Claude Lalanne, achetée quelques mois plus tôt par Gainsbourg dans une galerie de la rue de Lille à Paris. Ce qu'elle représente ? Un homme nu, assis, la tête remplacée par un chou. « J'ai croisé « L'homme à tête de chou » à la vitrine d'une galerie d'art contemporain, rembobinait-il. Quinze fois je suis revenu sur mes pas puis, sous hypnose, j'ai poussé la porte, payé cash et l'ai fait livrer à mon domicile. Au début il m'a fait la gueule, ensuite il s'est dégelé et m'a raconté son histoire : journaliste à scandale tombé amoureux d'une petite shampouineuse assez chou pour le tromper avec des rockers. Il la tue à coups d'extincteur, sombre peu à peu dans la folie et perd la tête qui devient chou... »
"L'homme a tête de Chou", 1968 - 2005 de Claude Lalanne - Courtesy Galerie Mitterrand © Éric Simon |
Il n'en fallait pas plus à Gainsbourg pour trouver là le concept de son nouvel album. Reconnaissant envers Claude Lalanne, le Français invite même ce dernier dans son studio d'enregistrement afin de lui faire écouter en avant-première ce qui deviendra l'un de ses monuments indépassables, voués à faire de l'ombre à ses bâtisses plus modestes mais appelés à être perpétuellement revisités par diverses générations d'auditeurs plus que jamais intrigués par cette proposition musicale, dont l'inspiration originale trône aujourd'hui encore rue de Verneuil, dans la maison autrefois habitée par Gainsbourg.
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