JC Darman
04 August 2022
C’est à Thierry Debroux que la réalisation de cette 36e édition a été confiée. À bon escient. L’actuel directeur du Théâtre du Parc (depuis 2011) est incontestablement passé maître dans l’art des mises en scène à grand spectacle (pour n’en citer qu’une : Cyrano de Bergerac présentée ici même à l’été 2019). Il s’attaque cette fois à The Most Excellent and Lamentable Tragedy of Romeo and Juliette (titre original).
La pièce fut créée entre fin 1596 et début 1597 mais Thierry Debroux a replacé l’action dans un approximatif XIXe siècle, une transposition qui n’a que le mérite de fluidifier un tant soit peu le cheminement du spectateur dans l’action. Il a su adroitement transfuser la gradation de l’œuvre qui débute en comédie, se développe en drame et s’achève en tragédie. La direction d’acteurs est efficace et inventive, tant lorsque le plateau et occupé par toute ta troupe que dans les scènes plus intimistes. Une spectaculaire scénographie imaginée par Patrick de Longrée vient encore étayer la mise en scène.
Les duels opposant les Montaigu aux Capulet sont de véritables chorégraphies (orchestrées par Émilie Guillaume), tout comme les gracieuses scènes de danse (réglées par Emmanuelle Lamberts) lors du bal masqué où s’emballe l’amour pathétique et absolu des deux adolescents. Le décor sonore (composé par Loïc Magotteaux) mêle des musiques contemporaines très inattendues en l’occurrence, mais en saisissante euphonie avec l’action (notamment un What a wonderful world d’une infinie tristesse interprété par 2 Wei).
© Del Diffusion
Le décor composé de structures d’échafaudages comporte un déconcertant praticable central constellé de tags. Il paraît d’abord hors de propos avec ce chef d’œuvre du théâtre élisabéthain, mais il a cependant une portée symbolique : il représente un mur de la soi-disant demeure de Juliette à Vérone qui était couvert de graffitis apposés par les innombrables touristes (la municipalité l’a recouvert aujourd’hui). Dans ce décor très particulier des soirs d’été dans les vestiges abbatiaux, les superbes éclairages (confiés à nouveau à Christian Stenuit) magnifient ce que Pierre Corneille appelait cette obscure clarté qui tombe des étoiles.
© Del Diffusion
La jeunesse de la troupe et son homogénéité concourent au succès de l’entreprise. Quelques individualités s’en détachent : Anouchka Vingtier (Lady Capulet, étonnante dans une scène d’ivresse), Michel Poncelet (Frère Laurent qui marie les amants et distille philtres et poisons), Jérôme Vilain (le comte Pâris, prétendant de Juliette) ou encore Denis Carpentier (Mercutio, l’ami de Roméo).
Baptiste Blampain (Roméo) et Mathilde Daffe (Juliette) © Del Diffusion
Quant aux deux personnages principaux, Baptiste Blampain (Roméo) et Mathilde Daffe (Juliette), ils forment avec beaucoup de talent ce couple devenu un mythe fondateur. Disons que la fulgurante passion qui mène les amants de la joie extatique à la mort est peut-être davantage perceptible chez l’interprète de la jeune Juliette.
« Une histoire qui jamais ne vit plus grand fléau que celle de Juliette et de son Roméo » est à voir à l’Abbaye de Villers-la-Ville jusqu’au 13 août 2022.
Le spectacle sera ensuite repris au Théâtre Royal du Parc du 8 septembre au 22 octobre 2022.
Spectacle
Une histoire qui jamais ne vit plus grand fléau que celle de Juliette et de son Roméo
Dates
Jusqu’au 13 août
Adresse
Abbaye de Villers-la-Ville
Rue de l’Abbaye, 55
1495 Villers-la-Ville
Billeterie
Sur internet
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