Martin Boonen
20 March 2019
Da Mimmo est une institution, couronnée d'une étoile Michelin. Et dire qu'on aurait pu en parler à l'imparfait. Mimmo Zizza, véritable personnage, fondateur et chef historique de cette adresse qui porte son prénom et malheureusement en proie à quelques problèmes de santé, songeait à passer la main.
C'est finalement Serge Litvine, homme d'affaires et gastronome qui se propose pour reprendre cette honorable maison woluwéenne. Ne ratant pas là l'occasion d'ajouter une septième étoile à son écurie gastronomique, après la Villa Lorraine*, la Villa in the sky**, la Villa Emily*, et 50% du Sea Grill** (il compte également à son palmarès les restaurants Odette en Ville, Gaudron et Lola).
Fossoyeur ou ange gardien de la gastronomie bruxelloise selon les opinions, Serge Litvine ne laisse personne indifférent. Restait à voir ce qu'il allait faire de son dernier joyaux.
Que les inconditionnels du lieu se rassurent : pas de révolution dans les assiettes ! Serge Litvine l'a promis : la cuisine de Da Mimmo restera celle de son ami Mimmo Zizza.
Vladimir Litvine épaulera Nicholas Tsiknakos en cuisine © DR |
Pour succéder au chef italien, Serge Litvine a choisit Nicholas Tsiknakos, ancien chef à l'hôtel Manos, et du restaurant (une étoile Michelin également) de l'hôtel Carlton de Zurich. Il est appuyé par le fils de Serge Litvine, Vladimir qui officie déjà avec brio derrière les fourneaux d'Odette en Ville.
Il ne restait plus au nouveau maitre d'hôtel, Giuseppe Giampiccolo, qu'à donner un petit coup de fraicheur à la décoration de la salle et Da Mimmo pouvait rouvrir.
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C'est d'ailleurs ce dernier qui vous accueille quand vous passez les portes du restaurant. Le sourire éclatant, une infini douceur dans le regard et une pointe d'accent québécois dans la chaleur de son italien. Giuseppe Giampiccolo a en effet travaillé pendant de longues années pour de belles maisons nord-américaines. Il emmène donc avec lui la chaleur et le sens de l'accueil du nouveau-monde, qu'il combine avec le style et l'élégance de l'Italie dont il est originaire.
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La décoration rafraîchie est douce, presque intime : pierres de parement brut sur un mur à l'éclairage tamisé, nappes blanches et fauteuils en tissus. Les teintes chocolats vous enveloppent sans vous étouffer. Ni trop, ni trop peu, juste ce qu'il faut pour profiter confortablement de ce que l'on va vous servir.
À l'apéritif, une flute de champagne de la cuvée R de Ruinart (retrouvez notre article sur l'engagement artistique de la vénérable maison champennoise ici) accompagne une trilogie de mises-en-bouche : carpaccio de bœuf façon Harry's bar, crème brûlée au foie gras et espuma de parmesan, gougère au pecorino cœur coulant. Si l'on eut sans doute préféré un verre de prosecco pour plonger immédiatement dans la dolce vita promise, les trois mise-en-bouche ne ratent pas la cible. Trois bouchées très différentes qui équilibrent entres-elle le croquant et le crémeux, le salé et le sucré.
Carpaccio de bœuf façon Harry's bar © DR |
Giuseppe déroule ensuite le reste du menu découverte (5 services) avec maitrise, l'agrémentant de commentaires sur l'origine des produits ou sur les secrets de fabrication du chef qui relèvent encore un peu plus le plaisir vécu dans l'assiette.
Dans l'ordre : coquille Saint-Jacques poêlées aller-retour, mousseline de topinambours, émulsion de girofle et truffes noires, suivi d'une raviole de ricotta, œuf et sauge, puis d'un filet de saumon Ora-King poêlé, espuma de wasabi, soya, fenouil et Shinzo japonais, enfin un filet pur de bœuf, poêlée de légumes de saison, pieds de moutons et son jus corsé, et pour terminer une Pavlova et son limoncello maison. Sans oublier les mignardises (Paris Brest, macaron citron, amarena, Madeleine façon Baba) au moment du café ou de la tisane.
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Un menu bien rodé que nous avons un peu bousculé en raison d'allergies au poisson et fruits de mer. Surpris mais pas décontenancé, Giuseppe Giampiccollo a su, avec la complicité très réactive de Nicholas Tsiknakos, s'adapter à la contrainte que, malgré nous, nous leur imposions. Défi de dernière minute relevé haut la main par le duo en salle et en cuisine. C'est à mettre à leur crédit.
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Même privé de la Saint-Jacques ou du saumon, nous n'étions pas à plaindre puisque ce fut l'occasion donc de découvrir les délicates taglierini à la truffe noire Mélanosporum et un riz-de-veau (accompagné de girolles) à la cuisson impressionnante de maitrise et dont la texture nous a laissé, pour plusieurs jours, un souvenir sur les papilles. Il était accompagné d'un verre d'un incroyable Volte de la maison Orenellaia (merlot, san giovese et cabernet sauvignon) dont le goût légèrement terreux (rappelant certains grands crus à Saint Emilion) s'accordait comme rarement avec les champignons et leur jus.
La délicate Pavlova servie en dessert © DR |
Mention spéciale aussi à la raviole, au dressage superbe, et dont la sauge vient apporter une fraicheur herbale presque anisée à l'assiette.
D'une manière générale, la cuisine de Da Mimmo est légère, aromatique et précise. Les dressages sont jolis, fins, ingénieux parfois. De l'assiette au palais, les cinq sens sont sollicités.
On ne rappellera jamais assez que, non, la cuisine italienne ne se résume pas à des pasta ou des pizze, que certains produits issus du triangle d'or (Parme-Modène-Mantoue) sont les meilleurs du monde, que le savoir-faire culinaire en Italie n'a pas d'égale sur la planète. Ce sont autant de lieux communs que de vérités absolues. Mais Da Mimmo, c'est encore plus que ça. Nous somme ici loin de l'ambiance populaire, généreuse et authentique des meilleures osterria et de la cuisine de la Mamma que pourtant l'on chéri tant aussi.
Les aériennes taglierini à la truffe noire Mélanosporum © DR |
Ici, la cuisine est véritablement italienne, mais pas seulement. Elle est portée à un niveau beaucoup plus universel. Da Mimmo, c'est de la cuisine italienne qui nous fait oublier qu'elle est italienne : de la cuisine italienne à son plus haut niveau.
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