Une pluie d'étoiles

Restaurant Bartholomeus **

Bart Desmidt n’a pas hésité à appeler le Michelin pour leur expliquer qu’il fallait retirer son restaurant Bartholomeus du fameux guide. Le chef avait décidé de tout recommencer à zéro avec un autre concept. “Tout marchait bien, mais je n’éprouvais plus aucun plaisir en cuisine, explique-t-il. J’étais las et mon personnel aussi, je le ressentais. J’avais également l’impression que ce sentiment se traduisait à table. J’ai eu ma première étoile en 2001, la deuxième treize ans plus tard. En 2019, j’ai pris la décision de fermer et de proposer un nouveau concept au mois d’avril 2020. Le nouveau Bartholomeus a reçu directement 2 étoiles… On est passé, d’un coup, de zéro à deux : les plus belles étoiles de ma vie ! C’était un pari risqué, mais les clients ont répondu présent. D’ailleurs, le restaurant est complet six mois à l’avance. Tout le monde arrive à la même heure, soit à midi soit à 19 heures, et mange la même chose, assis aux deux bars. On cuisine autour des clients. J’ai réduit l’équipe à quatre personnes. Mon épouse m’a suivi et s’occupe de l’accueil. Je n’ai pas changé de lieu, car mes racines sont importantes : c’est ici que je suis né et aujourd’hui, je m’y épanouis pleinement. Je me sens chez moi. Plus personne ne tire la tête et mes collaborateurs ne s’éclipsent plus pour scroller sur leur portable. [Sourire] Je cuisine les meilleurs produits de saison. Le poisson est toujours à l’honneur, le bœuf wagyu également. J’essaie de proposer la plus grosse langoustine, entre 300 et 350 grammes, ou, en hiver, un grand turbot. Je travaille de 7 heures à 2 heures du matin, mais je me sens libre dans la tête. Je ne vais plus me lancer dans la course aux étoiles, je suis heureux comme cela.”

Restaurant Bartholomeus, Zeedijk-Heist 267, Knokke-Heist • Tél. 050 51 75 76 • restaurantbartholomeus.be

Restaurant Sel gris *

À seize ans, Frédéric Deceuninck savait déjà qu’il aurait, un jour, un restaurant au firmament. En 2008, il reçoit une étoile du guide Michelin. Seize ans plus tard, il l’a conservée. En 2019, il se lance pourtant un nouveau défi aux côtés de Sander Van de Walle et Camille Steenhuyse en ouvrant le restaurant Caillou. Frédéric est l’homme de l’ombre. “On goûte tout ensemble, confie ce dernier, les sauces, les crèmes… Sander est le chef et Camille s’occupe de la salle. Je suis en retrait et ça me convient. J’ai toujours visé la deuxième étoile avec Sel Gris. Michelin estime probablement que je ne suis pas encore à ce niveau. Mais je ne baisse pas les bras. Je travaille tous les jours dans cet objectif et ça me satisfait. C’est cela qui me rend heureux. Je ne me mets pas de pression. Depuis que j’ai douze ans, je suis plongé dans la cuisine. J’accompagnais mes parents au restaurant. Aujourd’hui, la relève est assurée… [Rires] Mon petit-fils de cinq ans adore la cuisine !” Quand on demande à Frédéric si quatre restaurants étoilés à Knokke-Heist/ Duinbergen, ce n’est pas trop, il répond : “Je ne les vois pas comme des concurrents, plutôt comme des collègues. Chacun de ces restaurants est différent. Chez moi, c’est plus classique. Nous avons une clientèle qui nous suit.”

Sel Gris, Zeedijk-Duinbergen 314, Knokke-Heist • Tél. 050 51 49 37 • selgris.be

Boo Raan *

Originaire de la région d’Isaan, au nord-est de la Thaïlande, Dokkoon Kapueak décline dans son restaurant Boo Raan tous les plats qu’elle a appris à cuisiner aux côtés de sa grand-mère. Boo Raan, signifiant “tradition”, les clients qui s’attablent chez elle se voient expliquer la cuisine de la cheffe, sa région et ses traditions. “Chez nous, on ne mange pas avec des baguettes, confie-t-elle. On trouvera donc à table une fourchette et une cuillère. Il n’y a pas non plus le concept de menu traditionnel. Tous les plats sont servis en même temps afin de les partager. J’ai, bien sûr, adapté les épices aux palais occidentaux.” [Sourire] Avoir reçu une étoile pour sa cuisine est un signal important de la part d’un guide comme le Michelin. “Chez moi, poursuit-elle, c’est chill, relax. Le service est très souriant. On ne s’habille pas de manière ‘collet monté’. Il n’y a pas de tralala. Tout est dans l’assiette. Ma cuisine est savoureuse, préparée minute et directement sortie du wok. On sent tous les arômes, on goûte toutes les saveurs. J’ai un petit jardin où je cultive notamment de la coriandre et du basilic thaï. En hiver, chaque semaine, je suis obligée d’importer les produits de Thaïlande, car il n’y a pas assez de soleil ici.” En 2021, le Michelin lui décernait sa première étoile. “C’était bizarre, en plein Covid-19, j’étais derrière mon écran pour suivre la cérémonie, confie-t-elle, encore émue. J’ai entendu mon nom. J’ai été choquée, dans le bon sens du terme. Au même moment, on sonnait à ma porte pour me remettre la fameuse veste. C’est une immense fierté, une joie indescriptible. Je ne suis pas dans une logique de course aux étoiles, je fais de la cuisine de tous les jours.”

Boo Raan, Edward Verheyestraat 17, Knokke-Heist • Tél. 0476 30 30 48 • booraan.be

Restaurant Cuines 33 *

Voici douze ans, Edwin Menué ouvrait, à Knokke, Cuines, un restaurant de tapas récompensé, un an plus tard, par une étoile au Michelin. Aujourd’hui, le chef n’hésite pas à bousculer les codes en proposant une nouvelle expérience gastronomique dans son restaurant Cuines 33, ouvert il y a un mois. Exit donc les tapas ! “On accueille seize clients par service, explique-t-il. Ils arrivent ensemble, à la même heure, soit vers midi, soit vers 19 heures, avant de découvrir six pièces aux ambiances différentes. On débute par celle dans laquelle ils prennent l’apéro, puis on les suit, de pièce en pièce. Dans l’espace restaurant, tout est préparé devant les clients. L’ensemble du parcours offre une véritable expérience. Nous avons conservé la même qualité qu’avant : l’étoile nous a donc suivis. Je pense que le guide Michelin est assez ouvert d’esprit pour récompenser ce genre de concept. Après tout, on a bien reçu une étoile pour un restaurant de tapas… [Sourire] Nous travaillons les produits de la mer et les produits locaux, bien sûr, mais avec des ingrédients du monde entier. Je confectionne moi-même nos assiettes en céramique : j’accorde une attention particulière à tous les détails. Mon inspiration première, c’est la nature. L’année dernière, j’ai eu un cancer et j’ai eu le temps de penser à ma vie. C’était le bon moment pour expérimenter autre chose. Fleur, mon épouse, est sommelière et s’occupe de la salle. Je suis entouré seulement de quelques collaborateurs et j’ai renouvelé toute l’équipe en cuisine pour ce nouveau concept ambitieux.”

Cuines 33, Smedenstraat 33, Knokke-Heist • Tél. 050 60 60 69 • cuines33.be