Éric Jansen
25 October 2024
Mais à l’occasion d’Art Basel Paris et de Design Miami/Paris, Charles Zana traverse la Seine : il a exposé ses meubles et ses luminaires à l’Hôtel de la Marine, dans une aile jusqu’alors inconnue du grand public. Située à l’angle de la place de la Concorde et de la rue Royale, cette suite de salons en enfilade jouit d’une vue et d’une lumière particulièrement magnifiques au soleil couchant. Sur fond de boiseries gris Versailles, sobres et élégantes, et sous une hauteur de plafond de plus de cinq mètres, Charles Zana y mettait en scène une vingtaine de nouvelles pièces : tables, sièges, bibliothèque, bar… Des classiques revisités seront également présentés, à l’exemple du rocking chair Rimbaud pensé pour l’extérieur ou de ce spectaculaire lit Teddy orné d’une broderie réalisée spécialement par la maison Lesage Intérieurs. Quelques tableaux de Martha Jungwirth venaient parachever ce dialogue entre passé et présent. “C’est un joli clin d’œil de l’histoire de pouvoir exposer ici car, comme on le sait, avant d’accueillir le ministère de la Marine, ce bâtiment était le Garde-Meuble royal, l’ancêtre du Mobilier national. Donc un lieu dédié à l’excellence du savoir-faire français. Quelques siècles plus tard, les arts décoratifs y seront à nouveau mis à l’honneur.” En attendant de passer rive droite, Charles Zana nous livre ses adresses préférées, furieusement rive gauche.
© Sugaar
“Dans une ruelle, en face du café des Deux Magots, se cache ce restaurant à l’atmosphère de club privé. L’enseigne représente un dragon appelé Sugaar selon une légende basque, et les plats s’inspirent de la région. J’y vais dîner au moins une fois par semaine, non seulement parce que c’est délicieux, les produits sont parfaitement sourcés, mais j’aime l’ambiance tamisée, le bar au rez-de-chaussée et la salle au premier étage, où se presse une clientèle d’habitués, beaucoup de gens du monde de l’art et de la mode. C’est chic, chaleureux et festif.”
Sugaar • 5 Rue Gozlin, 75006 Paris, France • sugaarparis.com
© Saint Laurent Babylone
À l’angle de la rue des Saints-Pères et de la rue de Grenelle, la maison Saint Laurent a transformé la boutique, où étaient vendus sacs et souliers, en librairie-galerie. On reconnaît bien sûr la patte du directeur artistique Anthony Vaccarello dans le choix des livres, des photos, des disques et des expositions qui y sont organisées, comme celles consacrées à Gio Ponti ou à Serge Gainsbourg. J’y trouve toujours un livre d’art ou un magazine pointu, sans oublier les vinyles que je collectionne. Il y flotte un parfum seventies qu’Yves Saint Laurent aurait apprécié, j’en suis sûr.”
Saint Laurent Babylone • 9 Rue de Grenelle, 75007 Paris, France • ysl.com
© Édition Cahiers d'Art
“Une autre adresse, qui pour moi entretient la légende de Saint-Germain-des-Prés. La maison d’édition Cahiers d’Art est une institution, fondée en 1926 par Christian Zervos et sauvée par Staffan Ahrenberg en 2012. On y trouve de sublimes ouvrages sur Calder, Picasso ou Léger, mais aussi Frank Gehry, Hiroshi Sugimoto, Ai Weiwei, Adel Abdessemed… En face de l’espace dédié aux livres se trouve une petite galerie où sont exposés les artistes ‘maison’. En ce moment, on peut y voir les œuvres sur papier d’Ellsworth Kelly.”
Éditions Cahiers d’Art • 14–15 rue du Dragon, 75006 Paris • cahiersdart.com
© Sennelier
“Situé sur le quai Voltaire, ce magasin de couleurs est ma madeleine de Proust. Je venais y acheter des carnets de croquis en toile de lin, du papier calque, des blocs pour esquisses quand j’étais étudiant en architecture, à l’école des Beaux-Arts à côté. Aujourd’hui, lorsque j’ai besoin de me changer les idées, je sors de l’agence, je marche trois minutes et je pousse la porte du magasin, cela me détend immédiatement. Je flâne entre les rayons, dans une odeur de térébenthine, et je ressors avec un porte-mine ou de gros feutres pour colorier les plans.”
Sennelier • 3, Quai Voltaire, 75007 Paris • sennelier.fr
© Musée Delacroix
“C’est sans doute l’un des plus charmants musées parisiens. On y pénètre par une porte discrète sur la place de Furstemberg, qui est déjà un enchantement en soi, et ensuite on déambule dans l’appartement et l’atelier d’Eugène Delacroix, avant de sortir et d’accéder par un escalier au jardin. Un îlot de verdure et de calme, où je vais me ressourcer. J’ai aussi pour le musée un autre attachement personnel car j’ai pu y organiser en 2014 l’exposition Vasi e Fiori, qui réunissait une sélection de ma collection de vases de designers italiens.”
Musée national Eugène-Delacroix • 6 rue de Furstemberg, 75006 Paris • musee-delacroix.fr
© Mobilier national, Didier Herman
“Le lieu mérite déjà la visite pour la manufacture des Gobelins et le bâtiment d’Auguste Perret. Ensuite, les collections qui y sont entreposées sont uniques : 130 000 meubles, tapisseries, pendules, lustres… C’est l’histoire des arts décoratifs français du XVIIe siècle à nos jours. Un patrimoine que son président, Hervé Lemoine, fait vivre lors d’expositions passionnantes, comme celle consacrée aux années 1930-1950. Enfin, ce qui est amusant, c’est qu’à l’origine du Mobilier national, il y a le Garde-meuble de la Couronne, où j’expose bientôt.”
Mobilier National, Manufacture des Gobelins, Paris • 1, rue Berbier du Mets, 75013 Paris • mobiliernational.culture.gouv.fr
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