Bruno Colmant
02 March 2022
Le professeur Dr. Bruno Colmant est membre de l’Académie royale de Belgique. © DR
Il y a cinquante ans, c’était la fin tragique des traités monétaires d’après-guerre, appelés les “accords de Bretton Woods”. Mais un autre événement enchanta le monde et mit le temps en apesanteur… Nombreux sont les nostalgiques des Beatles qui donneraient quelques minutes de leur vie pour être projetés, il y a un demi-siècle, au Madison Square Garden de New York. Le premier jour du mois d’août 1971, c’est George Harrison, un des “quatre de Liverpool”, qui va donner le concert d’une vie. Mais ce concert, c’est aussi celui d’une génération de musiciens de génie, car tous ont répondu présent. Il y a Eric Clapton, Bob Dylan, Billy Preston, Ravi Shankar et aussi Ringo Starr, le mythique batteur des Beatles. Le concert est unique, car les Beatles se sont séparés depuis deux ans. Leur dernière séance d’enregistrement a été réalisée en janvier 1970, sans John Lennon. La page s’est alors tournée sur la plus belle aventure musicale du XXe siècle.
George Harrison, c’est l’auteur de Here Comes The Sun, Something et While My Guitar Gently Weeps. Et une larme coule sur sa guitare. D’ailleurs, Harrison, maigre dans son costume blanc, le visage creusé et légèrement voûté, semble tourmenté.
C’est le sitariste indien Ravi Shankar qui a persuadé les meilleurs musiciens pop de donner ce concert exceptionnel à New York. Mais pourquoi ce concert au Madison Square Garden ? Ravi Shankar a sensibilisé le monde à la catastrophe humanitaire du Bangladesh (ou Pakistan oriental), un des pays les plus pauvres du monde. En novembre 1970, un terrible cyclone a ravagé les côtes du pays. Au lieu d’organiser l’aide, le pouvoir totalitaire du Bangladesh organise des persécutions politiques et xénophobes. Les hindous établis dans le pays sont massacrés et 10 millions d’entre eux doivent fuir. Ce génocide fera plusieurs centaines de milliers de victimes.
C’est pour aider le pays et sensibiliser l’opinion que George Harrison anime ce concert. L’objectif sera atteint : 250 000 dollars seront envoyés en Asie, mais avec retard, car les autorités fiscales américaines ont voulu d’abord examiner les comptes d’Apple, la société de production des Beatles.
Alors quand on se rend à New York, il faut se souvenir qu’un chanteur et musicien surdoué d’une trentaine d’années avait choisi sa guitare, plutôt que son poing, pour lever les foules en faveur de la paix dans le monde. À quelques centaines de mètres de là, neuf ans plus tard, le 8 décembre 1980, un autre membre des Beatles, John Lennon – celui qui chantait Give Peace A Chance – mourait sous les balles d’un déséquilibré devant le Dakota Building. John Lennon avait pris conscience de son immense pouvoir d’influence et l’avait utilisé pour apaiser la jeunesse, plutôt que l’inquiéter.
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