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À Cancale, le souffle de l’authenticité

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Aurélie Koch

19 April 2025

Nul besoin de parcourir des milliers de kilomètres pour vivre un dépaysement total dans un endroit privilégié, authentique et surprenant. La description peut paraître facile, voire galvaudée, car de nombreux établissements méritent ces adjectifs du bout des lèvres. La famille Roellinger a construit un petit empire en Bretagne et chacune de ses adresses mérite ces superlatifs, et bien d’autres.

C’est Olivier Roellinger qui est à l’origine de tout. Son parcours a commencé au début des années 1980. Il ne se destinait pourtant pas à la restauration, ni à l’entreprenariat et encore moins à l’hôtellerie. Ses parents, originaires de Cancale, lui permettent de vivre une enfance heureuse dans la belle malouinière familiale. Son père, médecin, s’isole et reçoit ses patients dans une aile de la maison, tandis que le fils poursuit ses études et se projette dans une carrière scientifique. Jusqu’au drame. À l’âge de vingt-et-un ans, à Saint-Malo, Olivier subit une agression sauvage et est laissé pour mort, les jambes brisées, dans le coma. Nous sommes en 1976. Cet épisode traumatisant va totalement redéfinir sa trajectoire. Alité pendant deux ans, le jeune homme se remet petit à petit, réapprend tout et se passionne pour la cuisine et les épices, y associant un goût de retour à la vie. Il passe un diplôme de cuisinier et décide de rester dans les parages. Le cadre de ses expérimentation ? La maison familiale, une malouinière ayant appartenu à la famille Heurtault de Bricourt, cousins du corsaire malouin Robert Surcouf, du temps de la splendeur de ces maisons de villégiature qui ont poussé comme des champignons à l’époque de l’essor de Saint-Malo, sous Louis XIV et jusqu’au début du XVIIIe siècle.

Le château Richeux, une grande villa qui surplombe la baie, abrite le "bistrot" marin", Le Coquillage. © Romain Bassenne

Il n'a plus de bistrot que le nom, Hugo Roetllinger l'ayant repris en 2014 et ayant été récompensé de deux étoiles Michelin et une étoile verte depuis. © Romain Bassenne

Premiers pas

Olivier Roellinger y ouvre Le Bricourt, une table d’hôte sans prétention mais à son image. Tout au long de sa vie, l’idée ne sera pas de faire ce que les gens attendent de lui, mais d’entreprendre les choses avec une passion et une rigueur intactes. Et par là, répondre aux attentes des plus exigeants. Le succès arrive rapidement : Olivier Roellinger est repéré et félicité par le Gault & Millau à peine un an après avoir ouvert son établissement. Féru de cuisine et de chimie (sa formation première), il se passionne aussi pour les épices, renouant ainsi avec une tradition de la région, Saint Malo ayant été une plaque tournante du commerce des épices en lien avec la route des Indes et les échanges au long cours. La carrière de Roellinger prend dès lors un envol fulgurant Sa table est adoubée d’une étoile au Michelin en 1984, puis d’une seconde en 1988. Une troisième arrivera en 2006, deux ans seulement avant qu’il décide de fermer sa cuisine et de prendre un nouvel élan.

Entre-temps, il a, avec sa femme Jane, acquis le château Richeux, une grande villa qui surplombe la baie. Leur projet est d’y installer un “bistrot marin”, Le Coquillage. La Maison de Bricourt familiale, à Cancale, laisse ainsi l’espace à son laboratoire d’expérimentation et de réalisation de ses célèbres épices, aujourd’hui vendues dans le monde entier.

© Romain Bassenne

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© Romain Bassenne

© Romain Bassenne

© Romain Bassenne

© Romain Bassenne

© Romain Bassenne

© Romain Bassenne

Revenir à l’essentiel

Comment ne pas être touché par la justesse de ce parcours, l’authenticité de ces choix, la rigueur de ce travail quotidien ? Comme d’autres chefs avant lui, tels Joël Robuchon en 1996 ou Alain Senderens en 2005, Roellinger fait partie des quelques maîtres qui ont décidé de sortir du circuit Michelin et de rendre leur tablier au faîte de leur gloire. On ne peut imaginer décision plus difficile… ou plus raisonnable.

Les divers lieux de la famille Roellinger ont un dénominateur commun : simplicité et naturel. Au détour d’une route de campagne, on arrive en vue du château et l’on s’engage sur une voie plus campagnarde, en direction des “kleds” (les gîtes) de la Ferme du Vent. Le château distille un charme suranné, un confort bourgeois et provincial d’un autre siècle, avec vue imprenable sur la baie du Mont-Saint-Michel. Les kleds de la Ferme du Vent, en revanche, ont quelque chose de plus brut, mais non moins authentique. Toutes les chambres, grandes comme de petits appartements, sont également tournées vers le Mont-Saint-Michel, mais au niveau de la mer : le sentiment y est ainsi plus terrien. La vue est partagée entre l’eau, le Mont et les vaches écossaises qui paissent dans les pâturages jouxtant le jardin. Celui-ci abrite un potager magnifique d’où proviennent la plupart des ingrédients utilisés pour les préparations. Côté château, la table du Coquillage est incomparable. Cette grande adresse gastronomique a été reprise avec brio par Hugo, le fils d’Olivier et Anne Roellinger.

Les kleds offrent tous une vue sur la baie du Mont Saint-Michel. © Romain Bassenne

© Romain Bassenne

Une affaire de famille

L’œuvre du couple Roellinger ne serait pas ce qu’elle est sans cet esprit de transmission et de famille. Les deux enfants, Hugo et Mathilde, travaillent aujourd’hui en famille. Après quelques années passées dans la marine, Hugo a décidé de rejoindre le projet familial en 2014, reprenant le Coquillage. Sa sœur Chloé, avocate à Paris, lui a emboîté le pas trois ans plus tard, mais du côté de la commercialisation des épices et des produits dérivés de la mer que son père avait initiée peu de temps auparavant. L’esprit d’entreprise – et la ligne très claire établie par les parents – s’est transmis à la seconde génération : transparence et authenticité. Le talent également, puisque Hugo a obtenu sa seconde étoile au Michelin, en marge d’une élection de “chef de l’année” par le Gault & Millau.

Hugo Roellinger et sa femme Marine, avocate, qui a rejoint l'aventure familiale. © Romain Bassenne

Voici deux ans, une nouvelle adresse , le Bistrot de Cancale, a vu le jour sur la plage de Port Mer à Cancale, sous l’impulsion d’Hugo et de son épouse Marine, elle-même avocate et désireuse de s’associer au petit empire familial. Leur but ? Faire vivre un bistrot très simple, beaucoup plus abordable, pour revenir à l’essentiel. Comme un air de “déjà vécu” dans la famille…

Les chambres des kleds sont habillées de bois et pierres brutes, qui vont dans le sens de l'authenticité ambiante. © Romain Bassenne

Côté château, la déco est plus bourgeoise, et rappelle les maisons de famille au confort intemporel, que l'on trouve en Bretagne ou en Normandie. © Romain Bassenne

Cancale est ainsi devenu le fief de cette famille qui ne règne sur rien, à part ses propres projets. Si quelques voix locales peuvent y trouver à redire, on songe aux marins et aux corsaires qui osaient écrire une histoire personnelle au fil des siècles de rayonnement de la marine marchande et des épopées lointaines. Les Roellinger, Olivier en tête, et bientôt – qui sait ? – les petits-enfants, ont su développer une ambition qu’ils ne doivent qu’à leur travail, leur ténacité et leurs choix visionnaires. Depuis plus de quarante-cinq ans, les projets se sont succédé et ont toujours su attirer un public respectueux, désireux de vivre une expérience authentique. Se promener, lire au calme sur la terrasse du kled, dîner de langoustines fraîches et dans des proportions tellement généreuses qu’on demande d’en réserver une partie pour le pique-nique du lendemain, prendre un bain en laissant son regard errer au large, se ressourcer dans les eaux chaudes des bains celtiques… Vous avez demandé du dépaysement ?

Nos bonnes adresses

Mont Saint Michel

À faire

Le Mont Saint-Michel (à ± 45 minutes en voiture de Cancale)
ot-montsaintmichel.com

Gang des dauphins – observation de la biodiversité marine Port-Mer, Cancale.
al-lark.org/2019/02/reservation.html

Les Bains Celtiques à la Ferme du vent – Le Buot, Saint-Méloir-des-Ondes
Tél. +33 2 99 89 64 76maisons-de-bricourt.com

Où loger

Château Richeux & Ferme du Vent Le Buot, Saint-Méloir-des-Ondes
Tél. +33 2 99 89 64 76maisons-de-bricourt.com

Les Rimains 62 rue des Rimains, Cancale
Tél. +33 2 99 89 64 76maisons-de-bricourt.com

Les Gîtes marins 62 rue des Rimains, Cancale
Tél. +33 2 99 89 64 76maisons-de-bricourt.com

Où manger

Le Coquillage*** Le Buot, 35350 Saint-Méloir-des-Ondes
Tél. +33 2 99 89 64 76

Le Bistrot de Cancale 5 Rue Eugène et Auguste Feyen, Cancale
Tél. +33 2 99 89 64 76

Le Logis Sainte Catherine par le chef Jean Imbert 6 ruelle Sainte Catherine, Mont Saint-Michel
Tél. +33 2 33 89 14 45lelogissaintecatherine.com

La Mère Poulard Grande Rue, Le Mont Saint-Michel
Tél. +33 2 33 89 68 68lamerepoulard.com

Où faire ses emplettes

Épices Roellingerepices-roellinger.com

À lire

Boire les épices, Mathilde Roellinger et Beena Paradin Migotto, photos Anne-Claire Héraud, Éd. Ulmer, avril 2025, 160 p. 26 €

Les perles de Maxima

Chroniques royales

Sur le trône depuis 2020, le sultan d’Oman Haitham ben Tarik a effectué une visite officielle aux Pays-Bas à l’invitation du roi Willem-Alexander. Il a été reçu avec tous les honneurs sur la place du Dam, en face du palais royal, où il a assisté à un passage des troupes en revue avant que les hymnes nationaux ne retentissent. Les souverains ont ensuite offert un déjeuner privé à leur homologue omanais avant que ne débute un important forum économique bilatéral.

Informations supplémentaires

Hébergement

Maison de Bricourt

Adresse

1 Rue Duguesclin
35260 Cancale
France

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