Escapade Art déco à la Villa Lalique

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Une publication partagée par Camille Misson de Saint-Gilles (@camillemisson)

Lorsque Silvio Denz, esthète passionné de vin, d’art et de design, reprend la maison Lalique en 2008, son ambition dépasse largement la simple préservation d’un héritage. Il souhaite insuffler une nouvelle dynamique à l’univers de la marque, en alliant tradition, excellence artisanale et modernité. Parmi ses projets phares : redonner vie à la Villa René Lalique, demeure historique du maître-verrier, construite en 1920, et moderniser l’usine située non loin.

Cette villa, pensée par René Lalique comme un lieu de vie et de création, fut édifiée à proximité immédiate des ressources indispensables à la fabrication du verre : le sable, le bois et surtout un savoir-faire local ancestral. C’est dans ce même village de Wingen-sur-Moder que le maître inaugure, en 1921, sa propre verrerie. Après sa disparition en 1945, son fils Marc Lalique poursuit l’œuvre familiale en transformant l’usine et en opérant un virage décisif : l’abandon du verre au profit du cristal.

Près d’un siècle plus tard, Silvio Denz s’entoure des meilleurs talents afin de métamorphoser la villa en un lieu d’exception. Il confie à l’architecte suisse Mario Botta le soin d’y ajouter une extension contemporaine en verre et en pierre, respectueuse de l’esprit originel des lieux. Cette aile lumineuse accueille aujourd’hui un restaurant gastronomique doublement étoilé ainsi qu’une cave spectaculaire. L’ensemble inauguré en 2015, marque la renaissance éclatante de ce patrimoine unique, désormais lieu d’hospitalité, d’art de vivre et de haute gastronomie.

Sous la villa, une merveille attend les œnophiles : une cave abritant quelque 22 000 bouteilles, véritable sanctuaire dédié aux plus grands crus du monde. Bordeaux, Bourgogne, Toscane, Napa Valley… mais aussi des pépites plus confidentielles, issues de domaines méticuleusement sélectionnés par Silvio Denz lui-même. À quelques pas de là, une seconde cave, inaccessible au public, abrite dans un silence presque sacré près de 20 000 flacons en cours de vieillissement. Il suffit de feuilleter l’imposant livre de cave pour prendre la mesure de ce trésor œnologique : des bouteilles d’exception, comme un Château d’Yquem de 1865, y dorment à l’abri du temps.

À l’étage, six suites d’exception, réaménagées avec un raffinement extrême par Lady Tina Green et Pietro Mingarelli – designers d’intérieur, auteurs de la collection de meubles et accessoires de décoration de la maison –  plongent les hôtes dans l’univers onirique Lalique. Le cristal y règne en maître, subtilement intégré dans le mobilier, les luminaires et les détails. L’élégance est feutrée, la lumière, tamisée, et les matières, nobles. Tout ici invite à la contemplation.

L’art de recevoir à la française

C’est à table que la magie atteint son apogée. Car dîner à la Villa René Lalique est une expérience hors du commun. Sous la haute verrière imaginée par Botta, où la lumière danse entre verre, pierre et cristal, la cuisine étoilée de Paul Stradner s’exprime avec une audace millimétrée. Accompagné par le chef pâtissier Jonathan Bunel et Romain Iltis, sacré meilleur sommelier de France, ils signent ensemble une carte entre rigueur technique et poésie gustative.

Chaque assiette est une œuvre, servie avec la précision d’un ballet discret. Les produits sont nobles, les associations parfois inattendues mais toujours sublimes. Les accords mets-vins apportent une nouvelle dimension à l’ensemble. Petits pains, amuse-bouches et mignardises, rien n’est laissé au hasard. Un dîner ici, c’est un voyage sensoriel, un hommage à l’art de vivre à la française, sublimé par le cristal.

Dans les pas de René Lalique

À quelques minutes de la villa, le Musée Lalique prolonge l’enchantement. Installé dans une ancienne verrerie du village de Wingen-sur-Moder, il retrace l’incroyable parcours du créateur. Bijoux Art nouveau, flacons de parfum pour Coty, vitraux, objets décoratifs, ou encore les célèbres bouchons de radiateurs pour Rolls-Royce… L’exposition, scénographiée avec élégance, permet de saisir l’évolution d’un style unique, toujours en quête de modernité.

Le clou du séjour reste la visite privée de la manufacture Lalique. Malheureusement fermée au public, elle nous a exceptionnellement ouvert ses portes pour une plongée fascinante dans l’univers du cristal. Dans une atmosphère presque sacrée, les souffleurs, tailleurs, graveurs répètent leurs gestes avec une précision hypnotique. Chaque pièce requiert des heures, parfois des jours de travail minutieux. On comprend alors ce qui rend la signature Lalique si précieuse : une exigence silencieuse, transmise de génération en génération, comme un souffle d’éternité. Mais que les visiteurs se rassurent : le musée propose également des vidéos pédagogiques claires et captivantes, aussi explicatives qu’une visite guidée de l’usine.