Rédaction
12 July 2021
Et si cette fois, si c'était au "Genou d'Ahed" que reviendrait la Palme ? L'opus – obus ? - de Nadav Lapid arrive comme un coup de poing dans la figure. Dans une mise en scène puissante, élaborée, truffée de propos très critiques sur Israël, Nadav Lapid divise la Croisette. « La censure se trouve à l'intérieur de l'âme » lance le réalisateur israélien installé à Paris. Narcissique ? Colère nécessaire ? Le jury tranchera, les spectateurs choisiront. Autre déferlante: "Benedetta" de Paul Verhoeven avec Virginie Efira, très en formes. La polémique est à son comble. Faut-il que Verhoeven fasse son érotico-balsphémo scandale de plus ? D'aucuns apprécieront.
Marina Foïs et Pio Marmaï ("La Fracture") © Bestimage/Photo News |
Une violence autrement insoutenable : l'avortement, interdit au Tchad. Mahamat Saleh Haroun s'empare de ce tabou avec force et douceur. Le réalisateur tchadien décrypte le désespoir d'une fille-mère face à sa propre fille (15 ans) enceinte d'un père inconnu. Le poids de la religion, la pression du patriarcat sont insurmontables sauf que la sororité des femmes donne une lueur d'espoir. "Lingui Les liens sacrés" est magnifique de beauté et de pudeur.
Sean Penn filme sa fille Dylan Penn dans "The Flag Day", en sélection officielle. Une évidence car « je n'aurais jamais pu filmer une autre actrice pour interpréter le personnage de ma fille » confie le réalisateur-acteur américain. On suit le parcours un authentique braqueur de banque à travers les yeux de sa fille. Un thriller pas mal ficelé, un rien emphatique, mais réussi dans un décor du Mid West que n'aurait pas boudé Terrence Malick.
Le duo père-fille Sean & Dylan Penn © Doug Peters/Empics Entertainment/Photo News |
Charlotte Gainsbourg, quant à elle, a filmé sa mère, Jane, pendant des années. Elle monte les marches avec un documentaire touchant, pudique, nécessaire : « nous avons pu prendre le temps de nous retrouver à deux alors que nous avons toujours vécu entourées de tas de personnes » révèle Jane Birkin. Un peu étrange d'entrer dans l'intimité des stars mais le cinéma n'est-il pas aussi une histoire de familles ?
Après Sophie Marceau, l'actrice préférée des Français, voici le retour de la reine Catherine. Dans "De son vivant" d'Emmanuelle Bercot, l'actrice de 77 ans incarne une mère désespérée par l'état de santé de son fils, atteint d'une maladie incurable. Sélectionné hors compétition, ce drame tente de mettre des mots sur le sens "mourir de son vivant". Le suicide assisté est au centre de "Tout s'est bien passé" d'après l'œuvre d'Emmanuelle Bernheim que François Ozon a bien connue. André Dussollier incarne un père tyrannique, égoïste qui demande à sa fille Emmanuelle (Sophie Marceau) de l'aider à mourir. Une histoire vraie, filmée avec justesse sur la question délicate du droit à mourir.
François Ozon et Sophie Marceau "Tout s'est bien passé" © Bestimage/Photo News |
Changement de décor avec "La fracture", en sélection officielle. La réalisatrice Catherine Corsini revient sur la colère des gilets jaunes en France. Un film politique sur les dysfonctionnements du système hospitalier en France. Le sujet, criant d'actualité avec la crise sanitaire, se décline pendant une nuit aux urgences. La réalisatrice de "La belle saison" et de "Un amour impossible" signe un film aux allures de drame social qui bascule dans la comédie grâce au talent de ses interprètes, Valeria Bruni-Tedeschi, Marina Foïs et Pio Marmaï. Un peu d'Italie avec "Tre piani", une fresque familiale et sociale. Nani Moretti montait les marches au moment où la squadra azzura accédait au toit de l'Euro 2020. Un signe de palme ?
Pendant ce temps-là aux abords du Palais, quelques touristes le portable en mains tentent d'immortaliser la montée des marches. Peu de people endimanché dans les rues surchauffées de Cannes. Les boutiques de souvenirs affichent une bonne humeur un peu forcée. Mais ont sont passés les "fous" de Cannes ?
Nanni Moretti "Tre pianii" © Simone Comi/Ipa/Empics/Entertainment/Photo News |
Les salles de cinéma sont (quasiment) pleines. Ce qui fait le bonheur et rassure le délégué général Thierry Frémaux. L'applaudimètre était à son maximum lors de la projection du film belge "Un monde" de notre compatriote Laura Wandel. De la violence dans la cour d'école. La petite sœur veut protéger son grand frère, tête de turc d'une petite bande méchante. C'est sûr, Laura Wandel entre dans la cour des grands. Il y a fort à espérer - et à parier - que ce film lui aussi coup de poing récolte des récompenses. Pourquoi pas la Caméra d'or (prix décerné au premier long métrage) ou un prix d'interprétation aux magnifiques Maya Vanderbeque et Günter Duret.
Un petit message fait parler de lui dans tout le Palais. Une annonce quasi banale autour du port des masques a pris une ampleur démesurée depuis qu'une vidéo circule sur les réseaux sociaux, montrant des spectateurs sans masque dans le grand théâtre Lumière. La réaction a été immédiate, Le président du Festival Pierre Lescure himself fait un rappel à l'ordre, intimant tous les spectateurs à porter le masque. Ils ne verront pas Léa Seydoux, testée positive. Les festivaliers auront encore l'occasion de profiter d'une jolie balade cinéphilique : "Bergman Island" de Mia Hansen-Løve, "Les intranquilles" de Joachim Lafosse, "La fièvre de Petrov" de Kirill Serebrenniko , "The french dispatch" de Wes Anderson... que des temps forts en perspective. La 74e édition, si particulière, offre un programme foisonnant au jury qui aura des choix cornéliens à faire.
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