Rédaction
15 July 2016
Philippe Bidaine est journaliste et chroniqueur gastronomique. Ses billets, assaisonnés avec goût, se dégustent dans la DH, Paris Match et Le Vif/L'Express. Il a co-signé trois livres avec Pierre Wynants (l'emblématique chef du Comme chez Soi) et a écrit plusieurs livres sur les cuisines du monde. Il est, pour notre plus grand plaisir, notre premier ambassadeur dans l'univers de la mixologie.
Eventail.be - Philippe Bidaine, cet été, quel cocktail dégusterez-vous ?
L'un de mes préférés, c'est le Bloody Mary. Mais peut-on vraiment l'appeler cocktail ? Les mixologistes considèrent habituellement qu'un cocktail doit être composé d'au-moins deux alcools différents. Ce n'est pas le cas du Bloody Mary. Une réserve que l'on peut aussi avoir à propos du très à la mode gin-tonic.
- Admettons. Bloody Mary, quel nom étrange !
- C'est un cocktail qui doit son nom à sa couleur. C'est aussi le surnom donné à Marie Tudor, la soeur d'Elisabeth I : Marie la Sanglante (à cause des persécutions sur les protestants après sa tentative de réinstaller le catholicisme en Angleterre sous son règne, ndlr).
C'est donc tout naturellement a elle que l'on a pensé au moment d'élaborer un cocktail à base de jus de tomate.
Ce cocktail serait (et il faut garder le conditionnel) né au Harry's Bar, place Vendôme, à Paris. À l'époque (mais c'est aussi controversé) de la première guerre mondiale, la Harry's était un lieu fréquenté par tous les soldats et militaires américains.
Pour l'anecdote, 100 ans après le conflit, on peut toujours y lire cette inscription Sank Roodoonoo. Il s'agit simplement de la traduction anglaise et phonétique de l'adresse du lieu : 5, rue Daunou.
Philippe Bidaine, chroniqueur gastronomique © Droits réservés |
- Ses origines ne pas connues clairement, c'est le cas de sa recette également ?
- Non, au contraire, la recette est très simple : vodka, jus de tomate, sauce anglaise (Worcestershire Sauce), tabasco, poivre ... De nos jours, on y ajoute aussi du citron, qui était peut-être absent de la recette originale.
Je dis souvent que c'est un cocktail assez hypocrite puisqu'il a l'exacte apparence d'une innocent et très respectable jus de tomate, alors qu'il contient une part non négligeable de vodka (rire).
- C'est la raison pour laquelle vous l'aimez tant ?
- J'aime surtout et particulièrement ce petit goût salé que la sauce anglaise lui donne. Et puis sa texture, assez solide, en fait quelque chose d'à la fois désaltérant et nourrissant. C'est simplement génial. Rien que d'y penser, j'en salive.
- Comment le buvez-vous et à quel moment ?
C'est un cocktail qui évolue avec les époques et d'ailleurs, la version à la vodka n'est pas ma préférée. Il existe des variantes à base de rhum par exemple, ou de whisky. J'avoue avoir un faible pour un Bloody Mary avec un whisky tourbé, comme un Arbeig ou un Laphroaig, ou n'importe quel whisky d'Islay.
C'est fabuleux : ce coté viandeux et fumé se marie délicieusement bien avec la tomate.
Pour les versions à base de rhum, il faut préférer les rhums agricoles blancs.
Le Bloody Mary est devenu un vrai classique des brunchs du dimanche midi aux Etats-Unis, où ils le servent dans de grands vases ornée de branche de céleri ou de grappes d'olive.
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